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LOZ_2/LOZ120
Albert LOZEAU
Poésies complètes II
LE MIROIR DES JOURS
1907-1912
1912
LE MIROIR DES JOURS
(1907-1912)
I
LA VILLE ET LES BOIS
NOCTURNE
Comme il fait bon d’être plusieurs quand il fait noir, 12
Et que nous subissions l’influence du soir, 12
Rêveur, chacun de nous écoutait sa pensée 12
Par le même silence intimement bercée. 12
5 La nuit mélancolique épanchait sa douceur 12
Avec un caressant geste de grande sœur, 12
Et nous voyions passer dans l’ombre transparente, 12
De temps en temps, soudaine, une étoile filante. 12
Le firmament d’été fourmillait d’astres bleus 12
10 Irradiant l’éther d’éclats miraculeux. 12
L’heure était si puissante et si pleine de grâce 12
Que chacun la sentait respirer dans l’espace, 12
Dans le frissonnement d’une feuille, ou le bruit 12
D’un insecte invisible et tournoyant qui fuit… 12
15 Ah ! ce recueillement qui vient avec mystère, 12
Et d’autant plus profond qu’il est involontaire ! 12
La lampe s’est éteinte et le livre est fermé : 12
Nul ne songe à l’ouvrir, nul à la rallumer. 12
C’est dans son triste cœur, qu’éclaire la nuit noire, 12
20 Que chacun continue une émouvante histoire… 12
Rêve, ô suprême joie, ô consolation ! 12
Baume qui nous guérit du mal de l’action, 12
C’est le soir qu’on vous sent descendre sur nos plaies 12
Et couler, comme par la pitié de mains vraies ! 12
25 Et c’est vous qui dans les jours mauvais de combats 12
Nous faites prendre un peu patience ici-bas, 12
Et nous donnez, afin que nul ne se délivre, 12
La lâcheté peut-être héroïque de vivre ! 12
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