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Charles LOYSON
LE BONHEUR DE L'ÉTUDE :
discours en vers et autres poésies
1817
ODES
ODE I
LA RESTAURATION
MORTELS, assis au rang suprême, 8
Pour régner respectez nos droits ; 8
Les vrais appuis du diadême 8
Sont dans la justice et les lois. 8
5 En vain la force et le génie 8
Semblent faire à la tyrannie 8
Un insurmontable rempart ; 8
Rien n'est durable avec le crime, 8
Et tout empire illégitime 8
10 Tombe et s'abîme tôt ou tard. 8
Qu'est devenu le sceptre inique, 8
Le sceptre, instrument de forfaits, 8
Sous lequel un bras despotique 8
Fit gémir dix ans les Français ? 8
15 Insensé ! qui crus en esclave 8
Pouvoir traiter un peuple brave, 8
Qu'on ne soumet que par l'amour ! 8
Sous tes pieds en vain terrassée, 8
La Liberté s'est redressée, 8
20 Et te foule aux pieds à son tour, 8
Heureux, quand le sort l'abandonne, 8
Le tyran qui, privé d'espoir, 8
Perd la vie avec la couronne, 8
Et meurt ainsi que son pouvoir ! 8
25 Du moins l’éternelle justice 8
Ne lui fait pas de son supplice 8
Subir le plus affreux tourment : 8
Et ses innombrables victimes 8
Du bruit de leurs cris unanimes 8
30 N'insultent que son monument. 8
Tu vis, despote sans courage, 8
Que les Français ont rejeté ! 8
Tu vis, échappé du naufrage 8
Où périt ton autorité. 8
35 Vois tes images abattues, 8
Vois le peuple sur tes statues 8
Poursuivre encor ton souvenir, 8
De l'indignation publique, 8
Entends le concert véridique 8
40 Commencer pour ne plus finir. 8
Puisqu'à tout prix ton âme vaine 8
Voulut du bruit et du renom, 8
Repose-toi sur notre haine 8
Du soin d'éterniser ton nom, 8
45 De l'oubli bravant les ténèbres, 8
Les noms des criminels célèbres 8
Ont aussi leur éternité. 8
Nous maudissons encor Tibère ; 8
Et Néron, bourreau de sa mère, 8
50 Subit son immortalité, 8
Oui, nos campagnes converties 8
En théâtres sanglans de Mars ; 8
Nos richesses anéanties ; 8
Le deuil du commerce et des arts ; 8
55 Tant de races exterminées, 8
Tribut affreux que dix années 8
La mort leva sur tes succès ; 8
Voilà des traits ineffaçables, 8
Des monumens impérissables, 8
60 Par qui tu dois vivre à jamais. 8
Gloire impie ! ô combien diffère 8
La paisible célébrité 8
Des rois que le monde révère 8
Et que bénit l'humanité, 8
65 Des rois dont la sollicitude 8
Fit toujours sa plus chère étude 8
De se rendre utile aux mortels ; 8
Monarques vraiment héroïques, 8
Et dont les vertus pacifiques 8
70 Méritent seules nos autels ! 8
O noms d’immortelle durée, 8
Marc-Aurèle, Antonin,, Titus ! 8
O gloire innocente et sacrée 8
Qui ne coûtas que des vertus ! 8
75 De ta mémoire florissante, 8
La splendeur toujours renaissante 8
Ira croissant de jour en jour ; 8
Et, recueillant tous les hommages, 8
Elle traversera les âges, 8
80 Sous la garde de notre amour. 8
Oui, ce sont là les dignes marques 8
Qu'il faut laisser à l'avenir ! 8
Voilà comme un grand cour aux Parques 8
Sait dérober son souvenir ! 8
85 Voilà les invincibles charmes 8
Qui font encor couler nos larmes 8
Au nom du héros adoré, 8
Qui dans sa bonté paternelle, 8
A sa propre cause infidèle, 8
90 Nourrissait un peuple égaré. 8
Oh ! qui de ces belles années 8
Nous rendra les jours bienheureux, 8
Quand nos tranquilles destinées 8
Coulaient sous des rois généreux ? 8
95 Reviens, race de ces bons princes, 8
Reviens ; tes antiques provinces 8
Sous tes lois veulent refleurir ; 8
Viens, après vingt ans de souffrance, 8
Rendre à ta malheureuse France 8
100 Des rois qu'elle puisse chérir. 8
Ah ! si des erreurs déplorables 8
Ont pu séduire nos esprits, 8
Ceux qui nous rendirent coupables 8
Nous en ont fait payer le prix. 8
105 Oui, la vengeance est épuisée ; 8
Que ton ombre soit appaisée, 8
O toi, que je n'ose nommer ! 8
De nos fureurs noble victime ; 8
Toi, dont l'âme tendre et sublime, 8
110 Même en mourant, sut nous aimer. 8
Louis, si tu chéris encore 8
Ce peuple dont tu fus le Roi ; 8
Si de notre voix qui t'implore, 8
Les accens montent jusqu'à toi, 8
115 Du haut des sphères éternelles, 8
Séjour des âmes immortelles, 8
Vois-tu toute la France en pleurs, 8
Tendre les bras à ta famille, 8
Et conjurer enfin ta fille 8
120 De lui pardonner tes malheurs ? 8
Mais tu m'entends, ombre royale, 8
Tous nos souhaits sont accomplis. 8
Sur ton antique capitale 8
Mes yeux ont vu flotter les lis. 8
125 Plus de larmes, plus de tristesse ; 8
Que mille concerts d'allégresse 8
Jusques au ciel soient entendus ! 8
Enfin, des vengeances célestes, 8
Nos pleurs ont conjuré les restes : 8
130 Français, nos Rois nous sont rendus. 8
Courez, peuples : Louis s'avance ; 8
Il arrive ; il est parmi nous. 8
Je lis le bonheur de la France 8
Dans ses regards nobles et doux 8
135 Ébranlez-vous, sacrés portiques, 8
Tressaillez, ô temples antiques, 8
Secondez l'effort de nos voix ! 8
Dans la religieuse enceinte, 8
Pontife, apprêtez l'huile sainte 8
140 Qui consacre le front des rois. 8
Et nous, livrons-nous à la joie 8
Que nous offre un meilleur destin ; 8
Des maux dont nous fumes la proie, 8
Ce grand jour a marqué la fin. 8
145 Sous la douceur héréditaire 8
D'un gouvernement salutaire, 8
Oublions des tems désastreux ; 8
Mais profitons de leurs orages ; 8
Rendus au calme, soyons sages, 8
150 Si nous voulons rester heureux. 8
Ah ! laissons s'enivrer le Tibre, 8
De l'orgueil de ses vieux Romains ; 8
Si le Français doit être libre, 8
C'est en servant ses souverains. 8
155 Instruits au milieu des tempêtes, 8
Abaissons, sans rougir, nos têtes 8
Sous un sceptre antique et chéri ; 8
Et, quittant de folles chimères, 8
Servons, comme servaient nos pères, 8
160 Sous les Louis et les HENRI. 8
Ainsi, Dieu bienfaisant et juste, 8
Puisse parmi nous ta bonté 8
Protéger l'alliance auguste 8
Du trône et de la liberté ! 8
165 Ainsi, puisse ton assistance 8
Nous dispenser avec constance, 8
Des jours heureux et triomphans ! 8
Et que le joug intolérable 8
Qu'a brisé ta main secourable, 8
170 Et que le joug intolérable 8
N'opprime jamais nos enfans ! 8
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