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LFT_2/LFT331
Jean de LA FONTAINE
CONTES ET NOUVELLES
1668-1694
CONTES ET NOUVELLES ATTRIBUÉS A LA FONTAINE
XI
LA COUTURIÈRE
Certaine sœur, dans un couvent, 8
Avoit certain amant en ville, 8
Qu’elle no voyoit pas souvent ; 8
La chose, comme on sait, est assez difficile. 12
5 Tous deux eussent voulu qu’elle l’eût été moins ; 12
Tous deux, à s’entrevoir, apportoient tous leurs soins. 12
Notre sœur en trouva le secret la première : 12
Nonnettes, en ceci, manquent peu de talent. 12
Elle introduisit le galant, 8
10 Sous le titre de couturière. 8
Sous le titre et l’habit aussi, 8
Le tour ayant bien réussi, 8
Sans causer le moindre scrupule, 8
Nos amants eurent soin de fermer la cellule, 12
15 Et passèrent le jour assez tranquillement 12
À coudre, mais Dieu sait comment. 8
La nuit vint ; c’était grand dommage, 8
Quand on a le cœur à l’ouvrage. 8
Il fallut le quitter : « Adieu, ma sœur, bonsoir ! 12
20 — Couturière, jusqu’au revoir ! » 8
Et ma sœur fut au réfectoire, 8
Un peu tard, et c’est là le fâcheux de l’histoire. 12
L’abbesse l’aperçut, et lui dit en courroux : 12
« Pourquoi donc venir la dernière ? 8
25 — Madame, dit la sœur, j’avois la couturière. 12
— Vos guimpes ont donc bien des trous, 8
Pour la tenir une journée entière ? 10
Quelle besogne avez-vous tant chez vous, 10
Où jusqu’au soir elle soit nécessaire ? 10
30 — Elle en avoit encor, dit-elle, pour veiller ; 12
Au métier qu’elle a fait, on a beau travailler, 12
On y trouve toujours à faire. » 8
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