Métrique en Ligne
LFT_1/LFT63
Jean de LA FONTAINE
FABLES
1678-1694
FABLES CHOISIES MISES EN VERS
Éditions Thierry et Barbin (1678-1679) et Barbin (1694)
LIVRE IV
II
LE BERGER ET LA MER
Du rapport d'un troupeau, dont il vivoit sans soins, 12
Se contenta longtemps un voisin d'Amphitrite ; 12
Si sa fortune étoit petite, 8
Elle étoit sûre tout au moins. 8
5 À la fin, les trésors déchargés sur la plage 12
Le tentèrent si bien, qu'il vendit son troupeau, 12
Trafiqua de l'argent, le mit entier sur l'eau. 12
Cet argent périt par naufrage. 8
Son maître fut réduit à garder les brebis, 12
10 Non plus berger en chef comme il étoit jadis, 12
Quand ses propres moutons paissoient sur le rivage : 12
Celui qui s'étoit vu Corydon ou Tircis 12
Fut Pierrot, et rien davantage. 8
Au bout de quelque temps il fit quelques profits, 12
15 Racheta des bêtes à laine ; 8
Et comme un jour les vents, retenant leur haleine, 12
Laissoient paisiblement aborder les vaisseaux : 12
Vous voulez de l'argent, ô mesdames les Eaux, 12
Dit-il ; adressez-vous, je vous prie, à quelque autre : 12
20 Ma foi, vous n'aurez pas le nôtre. 8
Ceci n'est pas un conte à plaisir inventé. 12
Je me sers de la vérité 8
Pour montrer, par expérience, 8
Qu'un sou, quand il est assuré, 8
25 Vaut mieux que cinq en espérance ; 8
Qu'il se faut contenter de sa condition ; 12
Qu'aux conseils de la mer et de l'ambition 12
Nous devons fermer les oreilles. 8
Pour un qui s'en louera, dix mille s'en plaindront. 12
30 La mer promet monts et merveilles : 8
Fiez-vous-y ; les vents et les voleurs viendront. 12
logo du CRISCO logo de l'université