FABLES CHOISIES MISES EN VERS |
Éditions Thierry et Barbin (1678-1679) et Barbin (1694) |
LIVRE I |
XV |
LA MORT ET LE MALHEUREUX |
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Un malheureux appeloit tous les jours |
10 |
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La Mort à son secours. |
6 |
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O Mort ! lui disoit-il, que tu me sembles belle ! |
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Viens vite, viens finir ma fortune cruelle ! |
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5 |
La Mort crut, en venant, l'obliger en effet. |
12 |
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Elle frappe à sa porte, elle entre, elle se montre. |
12 |
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Que vois-je ! cria-t-il : ôtez-moi cet objet ! |
12 |
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Qu'il est hideux ! que sa rencontre |
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Me cause d'horreur et d'effroi ! |
8 |
10 |
N'approche pas, ô Mort ! ô Mort, retire-toi ! |
12 |
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Mécénas fut un galant homme ; |
8 |
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Il a dit quelque part : Qu'on me rende impotent, |
12 |
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Cul-de-jatte, goutteux, manchot, pourvu qu'en somme |
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Je vive, c'est assez, je suis plus que content. |
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15 |
Ne viens jamais, ô Mort ! on t'en dit tout autant. |
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Ce sujet a été traité d'une autre façon par Ésope, comme la fable
suivante le fera voir. Je composai celle-ci pour une raison qui me
contraignoit de rendre la chose ainsi générale. Mais quelqu'un me fit
connoître que j'eusse beaucoup mieux fait de suivre mon original, et
que je laissois passer un des plus beaux traits qui fût dans Ésope.
Cela m'obligea d'y avoir recours. Nous ne saurions aller plus avant
que les anciens : ils ne nous ont laissé pour notre part que la gloire
de les bien suivre. Je joins toutefois ma fable à celle d'Ésope, non
que la mienne le mérite, mais à cause du mot de Mécénas, que j'y fais
entrer, et qui est si beau et si à propos, que je n'ai pas cru le
devoir omettre.
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