Métrique en Ligne
LCA_2/LCA96
Louis LE CARDONNEL
CARMINA SACRA
1912
ORPHICA
IX
C'est toi que je voudrais, toi mon fils, toi mon frère, 12
Pour m'assister un jour dans l'angoisse dernière ; 12
Oui, toi qui m'as chéri, qui m'as compris : toi seul, 12
Afin de me plier dans l'austère linceul ; 12
5 Puis, tandis que plus rien, cœur et chair, ne palpite, 12
Quand, timide, au sortir de son corps, l'âme hésite, 12
Oui, seul je te voudrais, penché dans l'ombre, et là. 12
Parlant bas à celui qui, jadis, te parla. 12
L'hiver, près du foyer aux cordiales flammes, 12
10 De ce mystère où vont, après la mort, les âmes, 12
Me dire : je viendrai sur ta tombe, attends-moi. 12
La nuit, sans te remplir d'un solennel effroi, 12
S'épaissirait ; ta main allumerait, discrètes, 12
Ces lampes qui brillaient dans nos soirs de poètes 12
15 Tu sentirais, parmi le silence profond. 12
Que mon esprit ailé t'écoute et te répond. 12
Mon visage, oublieux des horreurs du long râle. 12
Sourirait, inondé de sérénité pâle ; 12
Tu me murmurerais : ami, je me souviens ; 12
20 Sois heureux : à mon tour je romprai mes liens ; 12
Dans ton repos j'aspire, ô mon maître, à te suivre… 12
La nuit s'écoulerait ; tu prendrais quelque livre, 12
Et, de ta voix d'antan, de ta plus tendre voix, 12
Tu me dirais des vers, lus ensemble, autrefois. 12
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