Métrique en Ligne
LCA_2/LCA91
Louis LE CARDONNEL
CARMINA SACRA
1912
ORPHICA
VI
Tu crains d'être de ceux qui, dans la fleur de l'âge, 12
Les yeux resplendissants, le cœur de rêves plein, 12
A peine à leurs aînés laissèrent une page, 12
Et sont morts, en gardant des trésors dans leur sein. 12
5 Ils n'ont pas connu même une amère victoire. 12
Seuls quelques-uns, parfois, encor les nommeront ; 12
A moins qu'une élégie, envers dignes de gloire, 12
N'apprenne aux temps futurs la beauté de leur front. 12
Tu vois ton Ombre unie à ces légères Ombres, 12
10 Dans un jardin funèbre aux languissants parfums, 12
Et moi, qui suis l'ami surtout des heures sombres, 12
D'un geste conjurant ces songes importuns. 12
Puisque pour travailler à quelque œuvre immortelle, 12
Les jours les mieux remplis toujours semblent trop courts, 12
15 Enfant de mes espoirs, sur toi mon âme appelle, 12
Par ses ardents désirs, l'abondance des jours. 12
Mais, si tu dois demain, médiocre, stérile, 12
T'en aller confondu dans le vulgaire épais, 12
Toi, né sur le rivage où vint mourir Virgile, 12
20 Dans un bonheur sans flamme ayant trouvé la paix, 12
Que ton dernier soupir à tes vingt ans s'exhale 12
A.vant que l'âpre vie ose te déflorer, 12
Pour qu'eu moi conservant ton image idéale, 12
Avec des pleurs divins je puisse te pleurer. 12
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