Métrique en Ligne
LAP_14/LAP216
Victor de LAPRADE
VARIA
1844-1879
XI
UNE VOIX ET DES AILES
I
Il est beau de fendre l'air, 7
De passer, fier et sauvage, 7
Plus rapide qu'un nuage, 7
Comme la flèche et l'éclair ; 7
5 Au delà des mers lointaines. 7
D'aborder le même jour, 7
A Paris sur une tour, 7
Sur un fronton dans Athènes ! 7
De planer en liberté 7
10 Sur les flots et sur les nues, 7
De fuir dans l'immensité 7
Vers les sphères inconnues ; 7
D'avoir vu tout l'infini 7
Et, sur l'heure, à tire-d'aile, 7
15 De revenir à son nid… 7
Bienheureuse l'hirondelle ! 7
II
Il est doux sur les buissons, 7
Dans les fleurs, sous la feuillée, 7
De tenir, à ses chansons, 7
20 La nature réveillée ; 7
De bercer au frais des soirs 7
Les cœurs en bonne fortune ; 7
D'endormir au clair de lune 7
Les amoureux désespoirs ! 7
25 De fredonner sur les gammes 7
Qui se chantent dans le ciel, 7
Avec cette voix de miel 7
Chère à l'oreille des femmes. 7
Il est doux, à petit vol. 7
30 Dans les jardins, porte close, 7
De glisser de rose en rose… 7
Bienheureux le rossignol ! 7
III
Mais je sais, sur notre terre, 7
Je sais un oiseau des bois 7
35 Qui vole et chante à la fois, 7
Sans se lasser, ni se taire. 7
Sa voix tendre à la douleur. 7
Sa grande aile vagabonde 7
Murmure de Heur en fleur 7
40 Voltige de monde en monde. 7
Ce chantre au souple gosier 7
Ce flotteur aux larges voiles, 7
Fait son nid dans un rosier, 7
Navigue vers les étoiles. 7
45 Il rase un moment le sol. 7
Remonte au ciel d'un coup d'aile. 7
Mélodieux rossignol 7
Aussi prompt que l'hirondelle. 7
Cet oiseau qui, librement, 7
50 Malgré la force ou la ruse. 7
Chante et plane au firmament. 7
L'oiseau divin, c'est la Muse. 7
Mai 1870.
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