Métrique en Ligne
LAM_3/LAM82
Alphonse de LAMARTINE
MÉDITATIONS POÉTIQUES
TROISIÈMES MÉDITATIONS
1812-1847
TREIZIÈME MÉDITATION
LE LÉZARD
SUR LES RUINES DE ROME
1846
Un jour, seul dans le Colisée, 8
Ruine de l’orgueil romain, 8
Sur l’herbe de sang arrosée 8
Je m’assis, Tacite à la main. 8
5 Je lisais les crimes de Rome, 8
Et l’empire à l’encan vendu, 8
Et, pour élever un seul homme, 8
L’univers si bas descendu. 8
Je voyais la plèbe idolâtre, 8
10 Saluant les triomphateurs, 8
Baigner ses yeux sur le théâtre 8
Dans le sang des gladiateurs. 8
Sur la muraille qui l’incruste, 8
Je recomposais lentement 8
15 Les lettres du nom de l’Auguste 8
Qui dédia le monument. 8
J’en épelais le premier signe : 8
Mais, déconcertant mes regards, 8
Un lézard dormait sur la ligne 8
20 Où brillait le nom des Césars. 8
Seul héritier des sept collines, 8
Seul habitant de ces débris, 8
Il remplaçait sous ces ruines 8
Le grand flot des peuples taris. 8
25 Sorti des fentes des murailles, 8
Il venait, de froid engourdi, 8
Réchauffer ses vertes écailles 8
Au contact du bronze attiédi. 8
Consul, César, maître du monde, 8
30 Pontife, Auguste, égal aux dieux, 8
L’ombre de ce reptile immonde 8
Éclipsait ta gloire à mes yeux ! 8
La nature a son ironie : 8
Le livre échappa de ma main. 8
35 Ô Tacite, tout ton génie 8
Raille moins fort l’orgueil humain ! 8
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