XIX |
A UNE JEUNE FILLE QUI ME DEMANDAIT DE MES CHEVEUX |
|
Des cheveux ! mais ils sont blanchis sous les années ! |
12 |
|
Des cheveux ! mais ils vont tomber sous les hivers ! |
12 |
|
Que feraient tes beaux doigts de leurs boucles fanées ? |
12 |
|
Pour tresser la couronne, il faut des rameaux verts. |
12 |
|
5 |
Crois-tu donc, jeune fille, aux jours d'ombre et de joie |
12 |
|
Qu'un front d'homme, chargé de quarante printemps, |
12 |
|
Germe ces blonds anneaux et ces boucles de soie |
12 |
|
Où l'espérance joue avec les dix-sept ans ? |
12 |
|
|
Crois-tu donc que la lyre, où notre ame s'accorde, |
12 |
10 |
Chante au fond de nos cœurs, toujours pleine de voix, |
12 |
|
Sans que de temps en temps il s'y rompe une corde |
12 |
|
Qui laisse, en se taisant, un vide sous nos doigts ? |
12 |
|
|
Pauvre naïve enfant ! que dirait l'hirondelle |
12 |
|
Si, quand l'hiver l'abat aux débris de sa tour, |
12 |
15 |
Ta voix lui demandait les plumes de son aile |
12 |
|
Qu'emporte la tempête ou sème le vautour ? |
12 |
|
|
Demande, dirait-elle, au nuage, à l'écume, |
12 |
|
A l'épine, au désert, aux ronces du chemin, |
12 |
|
A tous les vents du ciel j'ai laissé quelque plume, |
12 |
20 |
Et pour me réchauffer je n'ai plus que ta main ! |
12 |
|
|
Ainsi te dit mon cœur, jeune et tendre inconnue ; |
12 |
|
Mais quand dans ces cheveux vos souffles passeront, |
12 |
|
Je sentirai long-temps, malgré ma tempe nue, |
12 |
|
La sève de vingt ans battre encor dans mon front. |
12 |
|