Métrique en Ligne
LAM_1/LAM38
Alphonse de LAMARTINE
MÉDITATIONS POÉTIQUES
PREMIÈRES MÉDITATIONS
1820
TRENTE-HUITIÈME MÉDITATION
LES FLEURS
1837
Ô terre, vil monceau de boue 8
Où germent d’épineuses fleurs, 8
Rendons grâce à Dieu, qui secoue 8
Sur ton sein ces fraîches couleurs ! 8
5 Sans ces urnes où goutte à goutte 8
Le ciel rend la force à nos pas, 8
Tout serait désert, et la route 8
Au ciel ne s’achèverait pas. 8
Nous dirions : À quoi bon poursuivre 8
10 Ce sentier qui mène au cercueil ? 8
Puisqu’on se lasse en vain à vivre, 8
Mieux vaut s’arrêter sur le seuil. 8
Mais, pour nous cacher les distances, 8
Sur le chemin de nos douleurs 8
15 Tu semes le sol d’espérances, 8
Comme on borde un linceul de fleurs ! 8
Et toi, mon cœur, cœur triste et tendre, 8
Où chantaient de si fraîches voix ; 8
Toi qui n’es plus qu’un bloc de cendre 8
20 Couvert de charbons noirs et froids, 8
Ah ! laisse refleurir encore 8
Ces lueurs d’arrière-saison ! 8
Le soir d’été qui s’évapore 8
Laisse une pourpre à l’horizon. 8
25 Oui, meurs en brûlant, ô mon âme, 8
Sur ton bûcher d’illusions, 8
Comme l’astre éteignant sa flamme 8
S’ensevelit dans ses rayons ! 8
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