Métrique en Ligne
LAM_1/LAM16
Alphonse de LAMARTINE
MÉDITATIONS POÉTIQUES
PREMIÈRES MÉDITATIONS
1820
SEIZIÈME MÉDITATION
LA CHARITÉ
HYMNE ORIENTAL
1846
Dieu dit un jour à son soleil : 8
« Toi par qui mon nom luit, toi que ma droite envoie 12
» Porter à l’univers ma splendeur et ma joie, 12
» Pour que l’immensité me loue à son réveil ; 12
5 » De ces dons merveilleux que répand ta lumière, 12
» De ces pas de géant que tu fais dans les cieux, 12
» De ces rayons vivants que boit chaque paupière, 12
» Lequel te rend, dis-moi, dans toute ta carrière, 12
» Plus semblable à moi-même et plus grand à tes yeux ? » 12
10 — Le soleil répondit, en se voilant la face : 12
« Ce n’est pas d’éclairer l’immensurable espace, 12
» De faire étinceler les sables des déserts, 12
» De fondre du Liban la couronne de glace, 12
» Ni de me contempler dans le miroir des mers, 12
15 » Ni d’écumer de feu sur les vagues des airs ; 12
» Mais c’est de me glisser aux fentes de la pierre 12
» Du cachot où languit le captif dans sa tour, 12
» Et d’y sécher des pleurs au bord d’une paupière 12
» Que réjouit dans l’ombre un seul rayon du jour ! » 12
20 — « Bien ! reprit Jéhovah ; c’est comme mon amour ! » 12
Ce que dit le rayon au Bienfaiteur suprême, 12
Moi, l’insecte chantant, je le dis à moi-même. 12
Ce qui donne à ma lyre un frisson de bonheur, 12
Ce n’est pas de frémir au vain souffle de gloire, 12
25 Ni de jeter au temps un nom pour sa mémoire, 12
Ni de monter au ciel dans un hymne vainqueur ; 12
Mais c’est de résonner, dans la nuit du mystère, 12
Pour l’âme sans écho d’un pauvre solitaire 12
Qui n’a qu’un son lointain pour tout bruit sur la terre, 12
30 Et d’y glisser ma voix par les fentes du cœur. 12
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