Métrique en Ligne
LAF_2/LAF77
Jules LAFORGUE
Les Complaintes
1885
COMPLAINTE DES DÉBATS
MÉLANCOLIQUES ET LITTÉRAIRES
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On peut encore aimer, mais confier
toute son âme est un bonheur qu'on
ne retrouvera plus.
Corinne ou l'ITALIE.
Le long d'un ciel crépusculâtre, 8
Une cloche angéluse en paix 8
L'air exilescent et marâtre 8
Qui ne pardonnera jamais. 8
5 Paissant des débris de vaisselle, 8
Là-bas, au talus des remparts, 8
Se profile une haridelle 8
Convalescente ; il se fait tard. 8
Qui m'aima jamais ? Je m'entête 8
10 Sur ce refrain bien impuissant, 8
Sans songer que je suis bien bête 8
De me faire du mauvais sang. 8
Je possède un propre physique, 8
Un cœur d'enfant bien élevé, 8
15 Et pour un cerveau magnifique 8
Le mien n'est pas mal, vous savez. 8
Eh bien, ayant pleuré l'Histoire, 8
J'ai voulu vivre un brin heureux ; 8
C'était trop demander, faut croire ; 8
20 J'avais l'air de parler hébreux. 8
Ah ! Tiens, mon cœur, de grâce, laisse 8
Lorsque j'y songe, en vérité, 8
J'en ai des sueurs de faiblesse, 8
À choir dans la malpropreté. 8
25 Le cœur me piaffe de génie 8
Éperdument pourtant, mon Dieu ! 8
Et si quelqu'une veut ma vie, 8
Moi je ne demande pas mieux ! 8
Eh va, pauvre âme véhémente ! 8
30 Plonge, être, en leurs Jourdains blasés, 8
Deux frictions de vie courante 8
T'auront bien vite exorcisé. 8
Hélas, qui peut m'en répondre ! 7
Tenez, peut-être savez-vous 8
35 Ce que c'est qu'une âme hypocondre ? 8
J'en suis une dans les prix doux. 8
Ô Hélène, j'erre en ma chambre ; 8
Et tandis que tu prends le thé, 8
Là-bas dans l'or d'un fier septembre, 8
40 Je frissonne de tous mes membres, 8
En m'inquiétant de ta santé. 8
Tandis que d'un autre côté… 8
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