Métrique en Ligne
LAF_2/LAF66
Jules LAFORGUE
Les Complaintes
1885
COMPLAINTE DES GRANDS PINS
DANS UNE VILLA ABANDONNÉE
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à Bade.
Tout hier, le soleil a boudé dans ses brumes, 12
Le vent jusqu'au matin n'a pas décoléré, 12
Mais, nous point des coteaux là-bas, un œil sacré 12
Qui va vous bousculer ces paquets de bitume ! 12
5 ‒ Ah ! Vous m'avez trop, trop vanné, 8
Bals de diamants, hanches roses ; 8
Et, bien sûr, je n'étais pas né 8
Pour ces choses. 3
‒ Le vent jusqu'au matin n'a pas décoléré. 12
10 Oh ! Ces quintes de toux d'un chaos bien posthume, 12
‒ Prés et bois vendus ! Que de gens, 8
Qui me tenaient mes gants, serviles, 8
À cette heure, de mes argents, 8
Font des piles ! 3
15 ‒ Délayant en ciels bas ces paquets de bitume 12
Qui grimpaient talonnés de noirs Misérérés ! 12
‒ Elles, coudes nus dans les fruits, 8
Riant, changeant de doigts leurs bagues ; 8
Comme nos plages et nos nuits 8
20 Leur sont vagues ! 3
‒ Oh ! Ces quintes de toux d'un chaos bien posthume, 12
Chantons comme Memnon, le soleil a filtré, 12
‒ Et moi, je suis dans ce lit cru 8
De chambre d'hôtel, fade chambre, 8
25 Seul, battu dans les vents bourrus 8
De novembre. 3
‒ Qui, consolant des vents les noirs Misérérés, 12
Des nuages en fuite éponge au loin l'écume. 12
‒ Berthe aux sages yeux de lilas, 8
30 Qui priais Dieu que je revinsse, 8
Que fais-tu, mariée là-bas, 8
En province ? 3
‒ Memnons, ventriloquons ! Le cher astre a filtré 12
Et le voilà qui tout authentique s'exhume ! 12
35 ‒ Oh ! Quel vent ! Adieu tout sommeil ; 8
Mon Dieu, que je suis bien malade ! 8
Oh ! Notre croisée au soleil 8
Bon, à Bade. 3
‒ Il rompt ses digues ! Vers les grands labours qui fument ! 12
40 Saint Sacrement ! Et labarum des nox iræ ! 12
‒ Et bientôt, seul, je m'en irai, 8
À Montmartre, en cinquième classe, 8
Loin de père et mère, enterrés 8
En Alsace. 3
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