Métrique en Ligne
LAF_2/LAF60
Jules LAFORGUE
Les Complaintes
1885
COMPLAINTE DES NOCES DE PIERROT
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Où te flatter pour boire dieu, 8
Ma provisoire corybante ? 8
Je sauce mon âme en tes yeux, 8
Je ceins ta beauté pénitente, 8
5 Où donc vis-tu ? Moi si pieux, 8
Que tu m'es lente, lente ! 6
Tes cils m'insinuent : c'en est trop ; 8
Et leurs calices vont se clore, 8
Sans me jeter leur dernier mot, 8
10 Et refouler mes métaphores, 8
De leur petit air comme il faut ? 8
Isis, levez le store ! 6
Car cette fois, c'est pour de bon ; 8
Trop d'avrils, quittant la partie 8
15 Devant des charmes moribonds, 8
J'ai bâclé notre eucharistie 8
Sous les trépieds où ne répond 8
Qu'une aveugle Pythie ! 6
Ton tabernacle est dévasté ? 8
20 Sois sage, distraite égoïste ! 8
D'ailleurs, suppôt d'éternité, 8
Le spleen de tout ce qui n'existe 8
Veut qu'en ce blanc matin d'été, 8
Je sois ton exorciste ! 6
25 Ainsi, fustigeons ces airs plats 8
Et ces dolentes pantomimes 8
Couvrant d'avance du vieux glas 8
Mes toscins à l'hostie ultime ! 8
Ah ! Tu me comprends, n'est-ce pas, 8
30 Toi, ma moins pauvre rime ? 6
Introïbo, voici l'Époux ! 8
Hallali ! Songe au pôle, aspire ; 8
Je t'achèterai des bijoux, 8
Garde-moi ton ut de martyre… 8
35 Quoi ! Bébé bercé, c'est donc tout ? 8
Tu n'as plus rien à dire ? 6
‒ Mon dieu, mon dieu ! Je n'ai rien eu, 8
J'en suis encore aux poncifs thèmes ! 8
Son teint me redevient connu, 8
40 Et, sur son front tout au baptême, 8
Aube déjà l'air ingénu ! 8
L'air vrai ! L'air non mortel quand même ! 8
Ce qui fait que je l'aime, 6
Et qu'elle est même, vraiment, 7
45 La chapelle rose 5
Où parfois j'expose 5
Le Saint-Sacrement 5
De mon humeur du moment. 7
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