Métrique en Ligne
LAC_3/LAC220
Auguste LACAUSSADE
Les Épaves
1876
ÉTUDES POÉTIQUES
XIII
La Forêt coupée
La forêt est coupée. Adieu, nobles ramures, 12
Bois sacrés que la brise emplissait de murmures ! 12
L'oiseau n'a plus son nid sous vos dômes touffus ; 12
Le fleuve dans ses eaux ne vous réfléchit plus. 12
5 Contre l'ardent soleil plus d'ombre hospitalière ; 12
L'herbe abonde où passa la hache meurtrière. 12
Vieux amis, leurs grands corps sont couchés à mes pieds ! 12
Ce fut un arbre en fleur, ce tronc où je m'assieds ! 12
Là-bas, sur la montagne aux retraites ombreuses, 12
10 Nos ramiers ont porté leurs plaintes langoureuses ; 12
Le joyeux merle a fui ; tout se tait : — nulle voix 12
Ne redit pour mon cœur la chanson d'autrefois. 12
Brises qui sur mon front jouiez avec la feuille, 12
Vert silence des bois où l'âme se recueille, 12
15 Abris mystérieux à mes rêves connus, 12
O mes premiers amis ! qu'êtes-vous devenus ? 12
Comme vous, bois sacrés, couché dans la poussière, 12
De l'herbe sur mon sein, sous ma tête une pierre, 12
Bientôt je dormirai ! — mais, plein des jours passés, 12
20 Qui me rendra les pleurs que sur vous j'ai versés ? 12
Qu'importe ! Hâtez-vous, fugitives années ! 12
Hâtez-vous ! l'heure est vide et mes fleurs sont fanées. 12
Pourquoi, tombeau vivant, survivre à ses beaux jours ? 12
Mon cœur est le sépulcre où dorment mes amours. 12
Imité de Cowper
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