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LAC_2/LAC68
Auguste LACAUSSADE
Poèmes et Paysages
1852
POÈMES ET PAYSAGES
XXXVII
En Mer
Le ciel est pur, la vague est douce. 8
Ô diaphane, ô belle nuit ! 8
Au souffle tiède qui le pousse 8
Notre vaisseau vogue sans bruit. 8
5 Bleu cristal que nul vent ne plisse, 8
Le ciel est comme un lac dormant. 8
Sur le saphir la lune glisse, 8
Nacelle de nacre et d'argent. 8
Au lent roulis qui nous balance, 8
10 L'équipage s'est endormi ; 8
Seul avec l'onde et le silence, 8
Seul, je veille et cause à demi. 8
Ici, la brise dans la voile 8
A des soupirs pleins de douceur ; 8
15 Là-bas, luit une large étoile, 8
Qui me sourit comme une sœur. 8
Laissant de vaporeux sillages 8
Dans leur course au-dessus des eaux, 8
Au bord du ciel de blancs nuages 8
20 Errent comme de blancs agneaux. 8
Le cœur plein de volupté triste, 8
Les yeux perdus à l'horizon, 8
Je songe au doux saint Jean-Baptiste, 8
L'enfant à la blanche toison. 8
25 Tout est repos, tout est mollesse : 8
Une lumineuse fraîcheur 8
M'enivre, me berce et me laisse 8
Des rêves d'ange et de blancheur. 8
Je sens couler en tout mon être 8
30 Un ineffable apaisement : 8
Du monde où nous devons renaître 8
N'est-ce point un pressentiment ? 8
Je voudrais prier pour répandre 8
Mon trop-plein de vague bonheur, 8
35 Mais ma voix se refuse à rendre 8
La paix aimante de mon cœur. 8
Lune, nacelle de lumière, 8
Toi qui passes sur mon front nu, 8
Porte ma muette prière 8
40 Jusqu'au trône de l'Inconnu. 8
Dis-lui que sur ces tièdes lames 8
Où vient se jouer ton rayon, 8
L'œil baigné de tes belles flammes, 8
J'ai vers toi murmuré son nom ; 8
45 Dis-lui que dans mon sein qu'oppresse 8
Le poids de ta sérénité, 8
Une âme a frémi de tendresse 8
Devant ta pieuse clarté ; 8
Dis-lui que j'aime et que j'aspire, 8
50 Dis-lui mon chaste enivrement ; 8
Dis… ce que l'homme ne peut dire 8
Ni ne peut taire entièrement ! 8
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