Métrique en Ligne
HUG_9/HUG728
Victor HUGO
L'année terrible
1872
MARS
III
LE DEUIL
Charle ! Charle ! ô mon fils ! quoi donc ! tu m'as quitté 12
Ah ! tout fuit ! rien ne dure ! 6
Tu t'es évanoui dans la grande clarté 12
Qui pour nous est obscure. 6
5 Charles, mon couchant voit périr ton orient. 12
Comme nous nous aimâmes ! 6
L'homme, hélas ! crée, et rêve, et lie en souriant 12
Son âme à d'autres âmes ; 6
Il dit : C'est éternel ! et poursuit son chemin ; 12
10 Il se met à descendre, 6
Vit, souffre, et tout à coup dans le creux de sa main 12
N'a plus que de la cendre. 6
Hier j'étais proscrit. Vingt ans, des mers captif, 12
J'errai, l'âme meurtrie ; 6
15 Le sort nous frappe, et seul il connaît le motif. 12
Dieu m'ôta la patrie. 6
Aujourd'hui je n'ai plus de tout ce que j'avais 12
Qu'un fils et qu'une fille ; 6
Me voilà presque seul dans cette ombre où je vais ; 12
20 Dieu m'ôte la famille. 6
Oh ! demeurez, vous deux qui me restez ! nos nids 12
Tombent, mais votre mère 6
Vous bénit dans la mort sombre, et je vous bénis, 12
Moi, dans la vie amère. 6
25 Oui, pour modèle ayant le martyr de Sion, 12
J'achèverai ma lutte, 6
Et je continuerai la rude ascension 12
Qui ressemble à la chute. 6
Suivre la vérité me suffit ; sans rien voir 12
30 Que le grand but sublime, 6
Je marche, en deuil, mais fier ; derrière le devoir 12
Je vais droit à l'abîme. 6
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