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Le lion du midi voit venir l'ours polaire. |
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L'ours court droit au lion, grince, et plein de colère, |
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L'attaque plus grondant que l'autan nubien. |
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Et le lion lui dit : Imbécile ! c'est bien. |
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Nous sommes dans le cirque, et tu me fais la guerre. |
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Pourquoi ? Vois-tu là-bas cet homme au front vulgaire ? |
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C'est un nommé Néron, empereur des Romains. |
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Tu combats pour lui. Saigne, il rit, il bat des mains. |
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Nous ne nous gênions pas dans la grande nature, |
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Frère, et le ciel sur nous fait la même ouverture, |
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Et tu ne vois pas moins d'astres que je n'en vois. |
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Que nous veut donc ce maître assis sur un pavois ? |
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Il est content ; et nous, nous mourons par son ordre ; |
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Et c'est à lui de rire et c'est à nous de mordre. |
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Il nous fait massacrer l'un par l'autre ; et, pendant, |
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Frère, que mon coup d'ongle attend ton coup de dent, |
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Il est là sur son trône et nous regarde faire. |
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Nos tourments sont ses jeux ; il est d'une autre sphère. |
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Frère, quand nous versons à ruisseaux notre sang, |
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Il appelle cela de la pourpre. Innocent, |
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Niais, viens m'attaquer. Soit. Mes griffes sont prêtes ; |
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Mais je pense et je dis que nous sommes des bêtes |
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De nous entretuer avec tant de fureur, |
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Et que nous ferions mieux de manger l'empereur. |
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