Métrique en Ligne
HUG_8/HUG97
Victor HUGO
Odes et Ballades
1826
BALLADES
1823-1828
BALLADE DIXIÈME
À UN PASSANT
Au soleil couchant
Toi qui vas cherchant
Fortune,
Prends garde de choir :
La terre, le soir,
Est brune.

L'océan trompeur
Couvre de vapeur
La dune.
Vois : à l'horizon,
Aucune maison !
Aucune !

Maint voleur te suit ;
La chose est, la nuit,
Commune.
Les dames des bois
Nous gardent parfois
Rancune.

Elles vont errer ;
Crains d'en rencontrer
Quelqu'une.
Les lutins de l'air
Vont danser au clair
De lune.
La Chanson du fou.
Voyageur qui, la nuit, sur le pavé sonore 12
De ton chien inquiet passes accompagné, 12
Après le jour brûlant, pourquoi marcher encore ? 12
Où mènes-tu si tard ton cheval résigné ? 12
5 La nuit ! — Ne crains-tu pas d'entrevoir la stature 12
Du brigand dont un sabre a chargé la ceinture ? 12
Ou qu'un de ces vieux loups près des routes rôdants, 12
Qui du fer des coursiers méprisent l'étincelle, 12
D'un bond brusque et soudain s'attachant à ta selle, 12
10 Ne mêle à ton sang noir l'écume de ses dents ? 12
Ne crains-tu pas surtout qu'un follet à cette heure 12
N'allonge sous tes pas le chemin qui te leurre, 12
Et ne te fasse, hélas ! ainsi qu'aux anciens jours, 12
Rêvant quelque logis dont la vitre scintille 12
15 Et le faisan doré par l'âtre qui pétille, 12
Marcher vers des clartés qui reculent toujours ? 12
Crains d'aborder la plaine où le sabbat s'assemble, 12
Où les démons hurlants viennent danser ensemble ; 12
Ces murs maudits par Dieu, par Satan profanés, 12
20 Ce magique château dont l'enfer sait l'histoire, 12
Et qui, désert le jour, quand tombe la nuit noire 12
Enflamme ses vitraux dans l'ombre illuminés ! 12
Voyageur isolé, qui t'éloignes si vite, 12
De ton chien inquiet la nuit accompagné, 12
25 Après le jour brûlant, quand le repos t'invite, 12
Où mènes-tu si tard ton cheval résigné ? 12
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