Métrique en Ligne
HUG_8/HUG69
Victor HUGO
Odes et Ballades
1826
ODES
LIVRE CINQUIÈME
1819-1828
ODE SEPTIÈME
LE CAUCHEMAR
Oh ! j'ai fait un songe !… Il est
au-dessus des facultés de l'homme de
dire ce qu'était mon songe… L'œil
de l'homme n'a jamais vu, l'oreille
de l'homme n'a jamais ouï, la main
de l'homme ne peut jamais tâter,
ni ses sens concevoir, ni sa langue
exprimer en paroles ce qu'était mon rêve.
SHAKSPEARE.
Sur mon sein haletant, sur ma tête inclinée, 12
Écoute, cette nuit il est venu s'asseoir ; 12
Posant sa main de plomb sur mon âme enchaînée, 12
Dans l'ombre il la montrait, comme une fleur fanée, 12
5 Aux spectres qui naissent le soir. 8
Ce monstre aux éléments prend vingt formes nouvelles, 12
Tantôt d'une eau dormante il lève son front bleu ; 12
Tantôt son rire éclate en rouges étincelles ; 12
Deux éclairs sont ses yeux, deux flammes sont ses ailes ; 12
10 Il vole sur un lac de feu ! 8
Comme d'impurs miroirs, des ténèbres mouvantes 12
Répètent son image en cercle autour de lui ; 12
Son front confus se perd dans des vapeurs vivantes ; 12
Il remplit le sommeil de vagues épouvantes, 12
15 Et laisse à l'âme un long ennui. 8
Vierge ! ton doux repos n'a point de noir mensonge. 12
La nuit d'un pas léger court sur ton front vermeil. 12
Jamais jusqu'à ton cœur un rêve affreux ne plonge ; 12
Et quand ton âme au ciel s'envole comme un songe, 12
20 Un ange garde ton sommeil ! 8
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