Métrique en Ligne
HUG_7/HUG660
Victor HUGO
Les Chansons des rues et des bois
1865
LIVRE SECOND
II
OISEAUX ET ENFANTS
I
Oh ! les charmants oiseaux joyeux ! 8
Comme ils maraudent ! comme ils pillent ! 8
Où va ce tas de petits gueux 8
Que tous les souffles éparpillent ? 8
5 Ils s'en vont au clair firmament ; 8
Leur voix raille, leur bec lutine ; 8
Ils font rire éternellement 8
La grande nature enfantine. 8
Ils vont aux bois, ils vont aux champs, 8
10 À nos toits remplis de mensonges, 8
Avec des cris, avec des chants, 8
Passant, fuyant, pareils aux songes. 8
Comme ils sont près du Dieu vivant 8
Et de l'aurore fraîche et douce, 8
15 Ces gais bohémiens du vent 8
N'amassent rien qu'un peu de mousse. 8
Toute la terre est sous leurs yeux ; 8
Dieu met, pour ces purs êtres frêles, 8
Un triomphe mystérieux 8
20 Dans la légèreté des ailes. 8
Atteignent-ils les astres ? Non. 8
Mais ils montent jusqu'aux nuages. 8
Vers le rêveur, leur compagnon, 8
Ils vont, familiers et sauvages. 8
25 La grâce est tout leur mouvement, 8
La volupté toute leur vie ; 8
Pendant qu'ils volent vaguement 8
La feuillée immense est ravie. 8
L'oiseau va moins haut que Psyché. 8
30 C'est l'ivresse dans la nuée. 8
Vénus semble l'avoir lâché 8
De sa ceinture dénouée. 8
Il habite le demi-jour ; 8
Le plaisir est sa loi secrète. 8
35 C'est du temple que sort l'amour, 8
C'est du nid que vient l'amourette. 8
L'oiseau s'enfuit dans l'infini 8
Et s'y perd comme un son de lyre. 8
Avec sa queue il dit nenni 8
40 Comme Jeanne avec son sourire. 8
Que lui faut-il ? un réséda, 8
Un myrte, un ombre, une cachette. 8
Esprit, tu voudrais Velléda ; 8
Oiseau, tu chercherais Fanchette. 8
45 Colibri, comme Ithuriel, 8
Appartient à la zone bleue. 8
L'ange est de la cité du ciel ; 8
Les oiseaux sont de la banlieue. 8
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