Métrique en Ligne
HUG_6/HUG106
Victor HUGO
LES ORIENTALES
1829
IV
Enthousiasme
Allons, jeune homme ! allons, marche…!
André Chénier.
En Grèce ! en Grèce ! adieu, vous tous ! il faut partir ! 12
Qu'enfin, après le sang de ce peuple martyr, 12
Le sang vil des bourreaux ruisselle ! 8
En Grèce, ô mes amis ! vengeance ! liberté ! 12
5 Ce turban sur mon front ! ce sabre à mon côté ! 12
Allons ! ce cheval, qu'on le selle ! 8
Quand partons-nous ? ce soir ! demain serait trop long. 12
Des armes ! des chevaux ! un navire à Toulon ! 12
Un navire, ou plutôt des ailes ! 8
10 Menons quelques débris de nos vieux régiments, 12
Et nous verrons soudain ces tigres ottomans 12
Fuir avec des pieds de gazelles ! 8
Commande-nous, Fabvier, comme un prince invoqué ! 12
Toi qui seul fus au poste où les rois ont manqué, 12
15 Chef des hordes disciplinées, 8
Parmi les Grecs nouveaux ombre d'un vieux Romain, 12
Simple et brave soldat, qui dans ta rude main 12
D'un peuple as pris les destinées ! 8
De votre long sommeil éveillez-vous là-bas, 12
20 Fusils français ! et vous, musique des combats, 12
Bombes, canons, grêles cymbales ! 8
Éveillez-vous, chevaux au pied retentissant, 12
Sabres, auxquels il manque une trempe de sang, 12
Longs pistolets gorgés de balles ! 8
25 Je veux voir des combats, toujours au premier rang ! 12
Voir comment les spahis s'épanchent en torrent 12
Sur l'infanterie inquiète ; 8
Voir comment leur damas, qu'emporte leur coursier, 12
Coupe une tête au fil de son croissant d'acier ! 12
30 Allons…! — mais quoi, pauvre poète, 8
Où m'emporte moi-même un accès belliqueux ? 12
Les vieillards, les enfants m'admettent avec eux ! 12
Que suis-je ? — Esprit qu'un souffle enlève. 8
Comme une feuille morte échappée aux bouleaux, 12
35 Qui sur une onde en pente erre de flots en flots, 12
Mes jours s'en vont de rêve en rêve. 8
Tout me fait songer : l'air, les prés, les monts, les bois. 12
J'en ai pour tout un jour des soupirs d'un hautbois, 12
D'un bruit de feuilles remuées ; 8
40 Quand vient le crépuscule, au fond d'un vallon noir, 12
J'aime un grand lac d'argent, profond et clair miroir 12
Où se regardent les nuées. 8
J'aime une lune, ardente et rouge comme l'or, 12
Se levant dans la brume épaisse, ou bien encor 12
45 Blanche au bord d'un nuage sombre ; 8
J'aime ces chariots lourds et noirs, qui la nuit, 12
Passant devant le seuil des fermes avec bruit, 12
Font aboyer les chiens dans l'ombre. 8
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