Métrique en Ligne
HUG_31/HUG1990
Victor HUGO
OCÉAN VERS (complément)
1902
LE MANUSCRIT 24 787
1826-1851
F° 168-169
129/127. 1844. Océan, p.525
La fontaine Molière
L'une est la. fantaisie et l'autre est la pensée.
Deux déesses. Deux sœurs : L'une rit, l'autre songe.
Leurs bouches
Charmantes toutes deux et toutes deux farouches. 12
5 Elles aiment
Les lacs virgiliens, les antres frais, l'asile 12
Où rit le vieux Silène, où dort le beau Mnasyle, 12
L'air qui toujours se plaint, l'eau qui gémit toujours, 12
Et les vastes rameaux des bois profonds et sourds. 12
10 ... mêlent leur doux visage
Aux projets de l'enfant, aux chimères du sage ; 12
Et la nuit, quand il dort, viennent, chaste faveur, 12
Baiser le large front du poète rêveur. 12
Toutes deux vont glanant sur terre et dans les cieux. 12
15 Toutes deux d'ornements divins et gracieux 12
Aiment à rehausser la gaze de leurs voiles ; 12
Mais l'une y met des fleurs et l'autre des étoiles. 12
Elles mènent et emportent à travers l'espace
comme des oiseaux étranges
20 Les hippogriffes bleus, les Pégases dorés, 12
Tous ces chevaux divins, frissonnants, effarés, 12
Qui, fils des anciens luths et des lyres nouvelles, 12
Sur les parnasses verts ouvrent leurs grandes ailes. 12
. . . . .
Où le ciel disparaît dans les branches jalouses, 12
25 Voit leurs pieds nus empreints au velours des pelouses. 12
Oh ! les chastes beautés ! oh ! les pudiques sœurs ! 12
Comme elles vont des prés foulant les épaisseurs ! 12
Comme elles ont l'amour de la nature ! et comme, 12
Déesses qu'elles sont, elles méprisent l'homme ! 12
30 Ce sont elles pourtant, ces vierges aux fronts purs, 12
Que deux magiciens font vivre dans nos murs 12
Et que montrent aux yeux de la foule accourue 12
Molière sur'la scène et Pradier dans la rue ! 12
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