Métrique en Ligne
HUG_26/HUG1541
Victor HUGO
LES ANNÉES FUNESTES
1898
XLVI
DEUX ARRÊTS ONT ÉTÉ RENDUS CE MOIS-CI…
Oh ! je sais maintenant pourquoi je ne pouvais. 12
Respirer, trouvant l'air de la terre mauvais ; 12
Pourquoi j'avais le fiel du flot sombre à la bouche, 12
Pourquoi je m'agitais dans le sommeil farouche, 12
5 Et pourquoi dans l'espace immense, j'étouffais. 12
Deux meurtres viennent d'être en moins d'un mois refaits, 12
Recommencés, dans l'ombre où je suis, où vous êtes, 12
Peuple, et nous les sentons dégoutter sur nos têtes ! 12
En ce décembre obscur, aux sépulcres pareil, 12
10 Où l'on sent plus de honte avec moins de soleil, 12
Les hommes préposés à cette forfaiture 12
Qu'on nomme en France loi, code et magistrature, 12
Prêts, devant qui les paie, à fléchir le genou, 12
Jetant aux cabanons quiconque vole un sou, 12
15 Mais souriants devant un trône qu'on dérobe, 12
Ont trouvé le moyen de reteindre leur robe. 12
Avec du rouge pris, au baquet d'es bourreaux, 12
Le sang d'un innocent et le sang d'un héros ; 12
Et sur eux maintenant le reflet des abîmes 12
20 Flamboie, et leur justice a l'aspect de deux crimes ! 12
Si bien qu'à leurs jupons, tachés par leurs arrêts, 12
Voyant du sang ancien qui semble encor, tout frais, 12
Le peuple, en qui s'accroît la colère, à mesure 12
Que s'élargit sur eux la double éclaboussure, 12
25 Dit en les regardant avec son noir dédain : 12
D'un côté c'est Lesurque, et de l'autre, Baudin ! 12
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