Métrique en Ligne
HUG_26/HUG1514
Victor HUGO
LES ANNÉES FUNESTES
1898
XIX
SA CONSCIENCE
— Écoutais-tu parfois ta conscience ? — Certe ! 12
— Et que t'a-t-elle dit ?
— Elle m'a dit : Déserte
Tout sentier trop ardu, trop rude et trop étroit. 12
Heurte ce mot l'Honneur contre ce mot le Droit, 12
5 Et tire un son fêlé de l'un comme de l'autre. 12
Aie un tarif. Combien ce héros ? cet apôtre ? 12
Ce tribun ? C'est tant. Paie, et sois fort. Je t'absous. 12
Prends les millions, jette au peuple les gros sous. 12
Achète aux prêtres. Dieu. Jamais Dieu ne réclame. 12
10 Sois d'abord sûr d'tin fait, c'est que tu n'as point d'âme. 12
C'est agréable. On est nuit, matière, animal, 12
Cendre, et l'on ne fait rien de bien ni rien de mal 12
On arrive à la mort, juste aussi responsable 12
Que l'hydre s'échouant dans l'ombre sur le sable. 12
15 Raille ces fous, croyant au bien, au juste, au beau, 12
Qui pensent qu'un palais pèse sur un tombeau. 12
Jouis, et ne crains pas le sépulcre. Il est vide. 12
Jure et mens ; le serment est un fil qu'on dévide 12
Jusqu'à ce qu'il se casse. Alors, guerre, terreur, 12
20 Masque jeté, carnage et mort. Sois empereur. 12
Touche la cible, atteins le but, gagne le quine ; 12
Tue, éclate de rire, et règne !
— Ah ! la coquine !
H.H.
logo du CRISCO logo de l'université