Métrique en Ligne
HUG_24/HUG1200
Victor HUGO
TOUTE LA LYRE
1888-1893
III
XVII
Ceux par qui le malheur sur les innocents tombe, 12
Et qui n'ont pas de repentir, 8
Voudront après la mort voler hors de la tombe, 12
Dieu juste, et n'en pourront sortir. 8
5 Glaives, sceptres, gibets ! L'homme.aux cieux est contraire ; 12
C'est toujours l'homme du passé ! 8
Il s'aime dans lui-même et se hait dans son frère, 12
Cœur sombre où la ronce a poussé ! 8
Hélas ! on se regarde avec des yeux, funèbres, 12
10 Grands et petits, jeunes et vieux, 8
Et le riche orgueilleux se sent dans les ténèbres 12
Mordu par le pauvre envieux. 8
On crache sur Caton, on bave sur Socrate ; 12
Le fort est bon ; le faible a tort ; 8
15 Le déshérité rampe, et la terre est ingrate ; 12
Il pleut, c'est la nuit, l'enfant dort, 8
— Enfant, debout ! Va-t'en à ton travail ! C'est l'heure. — 12
Triste, il part ; nul ne le défend, 8
Et le ciel effrayant qui sanglote et qui pleure 12
20 Glace de ses larmes l'enfant. 8
Les femmes sont aux fers dans les lois : inégales ; 12
L'homme entend leurs cris de courroux, 8
Sans plus s'en émouvoir que du chant des cigales 12
Dans les chaumes des sillons roux. 8
25 Le cadavre d'un peuple, Europe, est à ta porte ; 12
Quoi, tous périssent pour un seul ! 8
O czar ! ô fossoyeur ! la Pologne est la morte, 12
La Sibérie est le linceul. 8
Des beautés sans pudeur, à leurs festins venues, 12
30 Disent aux oppresseurs merci ! 8
On frémit en voyant ces Vénus toutes nues, 12
L'âme étant toute nue aussi. 8
Peuple, libre, est-ce bien sous ton ciel que nous sommes ? 12
Écoutez ces hideux abois : 8
35 Le nègre fuit les chiens monstrueux, et les hommes 12
Chassent aux hommes dans les bois. 8
Partout vont gémissant les opprimés sans nombre 12
Dans les cités et dans les champs… — 8
File, ô ver du sépulcre, et fais ta toile sombre 12
40 Où se prend l'âme des méchants ! 8
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