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Devant les cieux qu'emplit un vague aspect d'effroi, |
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Sur tout, sans savoir qui, sans demander pourquoi, |
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Le philosophe pleure, aime, intercède, prie. |
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Il pense ; il sonde avec sa prunelle attendrie |
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Le mystère, et comprend que quelqu'un gémit là. |
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Il parle à l'infini comme Jean lui parla ; |
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Il y penche son âme et par cette ouverture |
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Répand un sombre amour sur la vaste nature ; |
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Il bénit à voix basse en marchant devant lui |
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Toutes les profondeurs de l'ombre et de l'ennui, |
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L'antre, l'herbe, les monts glacés, les arbres torses, |
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Les courants, les aimants, l'hydre aveugle des forces, |
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Les joncs tremblants, les bois tristes, les rochers nus, |
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L'air, l'onde, et le troupeau des monstres inconnus ; |
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Il console, incliné ; ce qui vit, ce qui souffre, |
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Et, tous les noirs captifs invisibles du gouffre, |
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Épars dans l'Être horrible aux effrayants halliers, |
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Enchaînés aux carcans ou tirant des colliers. |
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Il perçoit les soupirs des visions funèbres ; |
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Il sent râler l'espace et souffrir les ténèbres ; |
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Il console et secourt plus bas que l'animal ; |
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Tendre, il fait du bien, même à ce qui fait du mal ; |
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Sans distinguer sur qui tombent ses pleurs, lui-même |
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N'étant qu'une lueur flottant dans le problème, |
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Il prie, argile, chair, larve ; et semble un rayon |
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Aux sombres yeux ouverts dans l'expiation. |
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L'ardeur d'apaiser tout est sa sublime fièvre ; |
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Il va ! prophète ou non, qu'importe que sa lèvre |
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Ait ou n'ait pas le feu du céleste charbon ! |
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Il sait bien qu'on l'entend, qu'il suffit d'être bon, |
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Et que les exilés rêvent la délivrance ; |
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Il passe en murmurant Espérance ! espérance ! |
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Et toute la souffrance est un appel confus |
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À son cœur d'où jamais il ne sort un refus. |
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