Métrique en Ligne
HUG_24/HUG1177
Victor HUGO
TOUTE LA LYRE
1888-1893
II
XLIII
O RUS
Laissons les hommes noirs bâcler dans leur étable. 12
Des lois qui vont nous faire un bien épouvantable ; 12
Allons-nous-en aux bois ; 6
Allons-nous-en chez Dieu, dans les prés où l'on aime, 12
5 Près des lacs où l'on rêve, et ne sachons pas même 12
Si des gens font des lois ! 6
Oh ! quand on.peut s'enfuir aux champs, dans le grand songe, 12
Dans les fleurs, sous les cieux, les hommes de mensonge, 12
Prêtres, despotes, rois, 6
10 Comme c'est peu de chose, et comme ces : maroufles 12
Sont des fantômes vite effacés dans les souffles, 12
Les rayons et les voix ! 6
Laissons-les s'acharner à leur folle aventure. 12
Enfants, allons-nous-en là-haut, dans la nature. 12
15 Mai dore le ravin, 6
Tout rit, les papillons et leur douce poursuite 12
Passent, l'arbre est en fleur, venez, prenons la fuite 12
Dans cet oubli divin. 6
L'évanouissement des soucis de la terre 12
20 Est là ; les champs sont purs ; là souriait Voltaire, 12
Là songeait Diderot ; 6
On se sent rassuré par les parfums ; les roses 12
Nous consolent, étant ignorantes des choses 12
Que l'homme connaît trop. 6
25 Là, rien ne s'interrompt, rien ne finit'd'éclore ; 12
Le rosier respiré par Ève embaume encore 12
Nos deuils et nos amours ; 6
Et la pervenche est plus éternelle que Rome ; 12
Car ce qui dure peu, monts-et forêts, c'est l'homme ; 12
30 Les fleurs durent toujours. 6
La Pyramide après trois mille ans est ,ridée, 12
Le lys n'a pas un pli. — Ni la fleur, ni l'idée, 12
Ni le vrai, ni le beau, 6
N'expirent ; Dieu refait sans cesse leur jeunesse ; 12
35 La mort c'est l'aube, et c'est afin que tout renaisse 12
Que Dieu fit le tombeau. 6
Ô splendeur ! ô douceur ! l'étendue infinie 12
Est un balancement d'amour et d'harmonie ; 12
Contemplons à genoux ; 6
40 Une voix sort du ciel et dans nos fibres passe ; 12
De là nos chants profonds ; le rythme est dans l'espace 12
Et la lyre est en nous. 6
Venez, tous mes enfants, tous mes amis ! les plaines, 12
Les lacs, les bois n'ont point de perfides haleines 12
45 Et de haineux reflux ; 6
Venez ; soyons un groupe errant dans la prairie, 12
Qui va dans l'ombre avec des mots de rêverie 12
Et ne sait même plus, 6
Tant il sent vivre en lui la nature immortelle, 12
50 Si la Chambre a quitté Pantin pour Bagatelle, 12
Versailles pour Saint-Cloud, 6
Et si le pape enfin daigne rougir la jupe 12
Du prêtre dont le nom commence comme dupe 12
Et finit comme loup. 6
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