I |
XL |
|
Ô Georges, tu seras un homme. — Tu sauras |
12 |
|
À qui tu dois ton cœur, à qui tu dois ton bras, |
12 |
|
Ce que ta voix doit dire au peuple, à l'homme, au monde ; |
12 |
|
Et je t'écouterai dans ma tombe profonde. |
12 |
5 |
Songe que je suis là ; songe que je t'entends ; |
12 |
|
Demande-toi si nous, les morts, sommes contents ; |
12 |
|
Tu le voudras, mon George. Oh ! je suis bien tranquille ! |
12 |
|
|
Ce que pour le grand peuple a fait la grande ville, |
12 |
|
Tout ce qu'après Cécrops, tout ce qu'après Rhéa, |
12 |
10 |
Paris chercha, trouva, porta, fonda, créa, |
12 |
|
Ces passages du Nil, du Rhin et de l'Adige, |
12 |
|
La Révolution française, ce prodige, |
12 |
|
La chute du passé, d'où, l'homme libre sort, |
12 |
|
La clarté du génie et la noirceur du sort, |
12 |
15 |
La France subjuguant et délivrant la terre, |
12 |
|
Tout cela t'emplira l'âme de ce mystère |
12 |
|
Dont l'homme est saisi, quand, à l'horizon lointain, |
12 |
|
Il sent la mer immense ou l'énorme destin. |
12 |
|
|
C'est ainsi que se font ceux qui parlent aux foules, |
12 |
20 |
Ceux que les ouragans, les rocs, les flots, les houles, |
12 |
|
Attirent, et qui sont rêveurs dans ce milieu |
12 |
|
Où le travail de l'homme aide au travail de Dieu. |
12 |
|
Alors tu songeras à nos vaillants ancêtres |
12 |
|
Ôtant le sceptre aux rois, ôtant les dieux aux prêtres, |
12 |
25 |
Au groupe affreux, tyrans, pontifes, scélérats ; |
12 |
|
Ému, tu penseras ; pensif, tu grandiras. |
12 |
|
Est-ce un rêve ? oh ! je crois t'entendre. À l'âme humaine, |
12 |
|
Aux nations qu'un vent d'en haut remue et mène, |
12 |
|
Aux peuples entraînés vers le but pas à pas, |
12 |
30 |
Tu diras les efforts tentés, les beaux trépas, |
12 |
|
Les combats, les travaux, les reprises sans nombre, |
12 |
|
L'aube démesurée emplissant la grande ombre ; |
12 |
|
Pour maintenir les cœurs à ce puissant niveau, |
12 |
|
Tu feras des anciens jaillir l'esprit nouveau ; |
12 |
35 |
Tu diras de nos temps les lutteurs héroïques, |
12 |
|
Ces vainqueurs purs, ces fiers soldats, ces fronts stoïques, |
12 |
|
Et tu feras songer, en les peignant si bien, |
12 |
|
Le jeune homme à ton père et le vieillard au mien. |
12 |
|
Novembre 1879.
|