|
Un pauvre homme passait dans le givre et le vent. |
12 |
|
Je cognai sur ma vitre ; il s'arrêta devant |
12 |
|
Ma porte, que j'ouvris d'une façon civile. |
12 |
|
Les ânes revenaient du marché de la ville, |
12 |
5 |
Portant les paysans accroupis sur leurs bâts. |
12 |
|
C'était le vieux qui vit dans une niche au bas |
12 |
|
De la montée, et rêve, attendant, solitaire, |
12 |
|
Un rayon du ciel triste, un liard de la terre, |
12 |
|
Tendant les mains pour l'homme et les joignant pour Dieu. |
12 |
10 |
Je lui criai : « Venez vous réchauffer un peu. |
12 |
|
« Comment vous nommez-vous ? » Il me dit : « Je me nomme |
12 |
|
« Le pauvre. » Je lui pris la main : « Entrez, brave homme. » |
12 |
|
Et je lui fis donner une jatte de lait. |
12 |
|
Le vieillard grelottait de froid ; il me parlait, |
12 |
15 |
Et je lui répondais, pensif et sans l'entendre. |
12 |
|
« Vos habits sont mouillés », dis-je, »il faut les étendre |
12 |
|
« Devant la cheminée. » Il s'approcha du feu. |
12 |
|
Son manteau, tout mangé des vers, et jadis bleu, |
12 |
|
Étalé largement sur la chaude fournaise, |
12 |
20 |
Piqué de mille trous par la lueur de braise, |
12 |
|
Couvrait l'âtre, et semblait un ciel noir étoilé. |
12 |
|
Et, pendant qu'il séchait ce haillon désolé |
12 |
|
D'où ruisselaient la pluie et l'eau des fondrières, |
12 |
|
Je songeais que cet homme était plein de prières, |
12 |
25 |
Et je regardais, sourd à ce que nous disions, |
12 |
|
Sa bure où je voyais des constellations. |
12 |