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HUG_17/HUG358
Victor HUGO
CHÂTIMENTS
1853
LIVRE V
L'AUTORITÉ EST SACRÉE
VII
LES GRANDS CORPS DE L'ÉTAT
Ces hommes passeront comme un ver sur le sable. 12
Qu'est-ce que tu ferais de leur sang méprisable ? 12
Le dégoût rend clément. 6
Retenons la colère âpre, ardente, électrique. 12
5 Peuple, si tu m'en crois, tu prendras une trique 12
Au jour du châtiment. 6
Ô de Soulouque-deux burlesque cantonade ! 12
Ô ducs de Trou-Bonbon, marquis de Cassonade, 12
Souteneurs du larron, 6
10 Vous dont la Poésie, ou sublime ou mordante, 12
Ne sait que faire, gueux, trop grotesques pour Dante, 12
Trop sanglants pour Scarron, 6
Ô jongleurs, noirs par l'âme et par la servitude, 12
Vous vous imaginez un lendemain trop rude, 12
15 Vous êtes trop tremblants, 6
Vous croyez qu'on en veut, dans l'exil où nous sommes, 12
À cette peau qui fait qu'on vous prend pour des hommes ; 12
Calmez-vous, nègres blancs ! 6
Cambyse, j 'en conviens, eût eu ce cœur de roche 12
20 De faire asseoir Troplong sur la peau de Baroche ; 12
Au bout d'un temps peu long, 6
Il eût crié : cet autre est pire ! qu'on l'étrangle ! 12
Et, j 'en conviens encore, eût fait asseoir Delangle 12
Sur la peau de Troplong. 6
25 Cambyse était stupide et digne d'être auguste ; 12
Comme s'il suffisait pour qu'un être soit juste, 12
Sans vices, sans orgueil, 6
Pour qu'il ne soit pas traître à la loi, ni transfuge, 12
Que d'une peau de tigre ou d'une peau de juge 12
30 On lui fasse un fauteuil ! 6
Toi, peuple, tu diras : — ces hommes se ressemblent. 12
Voyons les mains, — et tous trembleront comme tremblent 12
Les loups pris aux filets. 6
Bon. Les uns ont du sang, qu'au bagne on les écroue, 12
35 À la chaîne ! Mais ceux qui n'ont que de la boue, 12
Tu leur diras : — Valets ! 6
La loi râlait, ayant en vain crié : main-forte ! 12
Vous avez partagé les habits de la morte. 12
Par César achetés, 6
40 De tous nos droits livrés vous avez fait des ventes ; 12
Toutes ses trahisons ont trouvé pour servantes 12
Toutes vos lâchetés ! 6
Allez, fuyez, vivez ! pourvu que, mauvais prêtre, 12
Mauvais juge, on vous voie en vos trous disparaître, 12
45 Rampant sur vos genoux, 6
Et qu'il ne reste rien, sous les cieux que Dieu dore, 12
Sous le splendide azur où se lève l'aurore, 12
Rien de pareil à vous ! 6
Vivez, si vous pouvez ! l'opprobre est votre asile. 12
50 Vous aurez à jamais, toi, cardinal Basile, 12
Toi, sénateur Crispin, 6
De quoi boire et manger dans vos fuites lointaines 12
Si le mépris se boit comme l'eau des fontaines, 12
Si la honte est du pain ! 6
55 Peuple, alors nous prendrons au collet tous ces drôles, 12
Et tu les jetteras dehors par les épaules 12
À grands coups de bâton ; 6
Et dans le Luxembourg, blancs sous les branches d'arbre, 12
Vous nous approuverez de vos têtes de marbre, 12
60 Ô Lycurgue, ô Caton ! 6
Citoyens ! le néant pour ces laquais se rouvre ; 12
Qu'importe, ô citoyens ! l'abjection les couvre 12
De son manteau de plomb. 6
Qu'importe que le soir, un passant solitaire, 12
65 Voyant un récureur d'égouts sortir de terre, 12
Dise : tiens ! c'est Troplong ! 6
Qu'importe que Rouher sur le Pont-Neuf se carre, 12
Que Baroche et Delangle, en quittant leur simarre, 12
Prennent des tabliers, 6
70 Qu'ils s'offrent pour trois sous, oubliés quoiqu'infâmes, 12
Et qu'ils aillent, après avoir sali leurs âmes, 12
Nettoyer vos souliers ! 6
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