Métrique en Ligne
HUG_17/HUG344
Victor HUGO
CHÂTIMENTS
1853
LIVRE IV
LA RELIGION EST GLORIFIÉE
VI
ÉCRIT LE 7 JUILLET 1851
EN DESCENDANT DE LA TRIBUNE
Ces hommes qui mourront, foule abjecte et grossière, 12
Sont de la boue avant d'être de la poussière. 12
Oui, certe, ils passeront et mourront. Aujourd'hui 12
Leur vue à l'honnête homme inspire un mâle ennui. 12
5 Envieux, consumés de rages puériles, 12
D'autant plus furieux qu'ils se sentent stériles, 12
Ils mordent les talons de qui marche en avant. 12
Ils sont humiliés d'aboyer, ne pouvant 12
Jusqu'au rugissement hausser leur petitesse. 12
10 Ils courent, c'est à qui gagnera de vitesse, 12
La proie est là — hurlant et jappant à la fois, 12
Lancés dans le sénat ainsi que dans un bois, 12
Tous contondus, traitant, magistrat, soldat, prêtre, 12
Meute autour du lion, chenil aux pieds du maître, 12
15 Ils sont à qui les veut, du premier au dernier, 12
Aujourd'hui Bonaparte et demain Changarnier ! 12
Ils couvrent de leur bave honneur, droit, république, 12
La charte populaire et l'œuvre évangélique, 12
Le progrès, ferme espoir des peuples désolés ; 12
20 Ils sont odieux. — Bien. Continuez, allez ! 12
Quand l'austère penseur qui, loin des multitudes, 12
Rêvait hier encore au fond des solitudes, 12
Apparaissant soudain dans sa tranquillité, 12
Vient au milieu de vous dire la vérité, 12
25 Défendre les vaincus, rassurer la patrie, 12
Éclatez ! répandez cris, injures, furie, 12
Ruez-vous sur son nom comme sur un butin ! 12
Vous n'obtiendrez de lui qu'un sourire hautain, 12
Et pas même un regard ! — Car cette âme sereine 12
30 Méprisant votre estime, estime votre haine. 12
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