Métrique en Ligne
HUG_11/HUG264
Victor HUGO
Les Rayons et les Ombres
1840
IX
À MADEMOISELLE FANNY DE P.
Ô vous que votre âge défend, 8
Riez ! tout vous caresse encore. 8
Jouez ! chantez ! soyez l'enfant ! 8
Soyez la fleur ; soyez l'aurore ! 8
5 Quant au destin, n'y songez pas. 8
Le ciel est noir, la vie est sombre. 8
Hélas ! que fait l'homme ici-bas ? 8
Un peu de bruit dans beaucoup d'ombre. 8
Le sort est dur, nous le voyons, 8
10 Enfant ! souvent l'œil plein de charmes 8
Qui jette le plus de rayons 8
Répand aussi le plus de larmes. 8
Vous que rien ne vient éprouver, 8
Vous avez tout, joie et délire, 8
15 L'innocence qui fait rêver, 8
L'ignorance qui fait sourire. 8
Vous avez, lys sauvé des vents, 8
Cœur occupé d'humbles chimères, 8
Ce calme bonheur des enfants, 8
20 Pur reflet du bonheur des mères. 8
Votre candeur vous embellit. 8
Je préfère à toute autre flamme 8
Votre prunelle que remplit 8
La clarté qui sort de votre âme. 8
25 Pour vous ni soucis ni douleurs, 8
La famille vous idolâtre. 8
L'été, vous courez dans les fleurs ; 8
L'hiver, vous jouez près de l'âtre. 8
La poésie, esprit des cieux, 8
30 Près de vous, enfant, s'est posée ; 8
Votre mère l'a dans ses yeux, 8
Votre père dans sa pensée. 8
Profitez de ce temps si doux ! 8
Vivez ! — La joie est vite absente ; 8
35 Et les plus sombres d'entre nous 8
Ont eu leur aube éblouissante. 8
Comme on prie avant de partir, 8
Laissez-moi vous bénir, jeune âme, — 8
Ange qui serez un martyr ! 8
40 Enfant qui serez une femme ! 8
logo du CRISCO logo de l'université