LIVRE DEUXIÈME |
L'ÂME EN FLEUR |
XII |
Églogue |
|
Nous errions ; elle et moi, dans les monts de Sicile. |
12 |
|
Elle est fière pour tous et pour moi seul docile. |
12 |
|
Les cieux et nos pensers rayonnaient à la fois. |
12 |
|
Oh ! comme aux lieux déserts les cœurs sont peu farouches ! |
12 |
5 |
Que de fleurs aux buissons, que de baisers aux bouches, |
12 |
|
Quand on est dans l'ombre des bois ! |
8 |
|
|
Pareils à deux oiseaux qui vont de cime en cime, |
12 |
|
Nous parvînmes enfin tout au bord d'un abîme. |
12 |
|
Elle osa s'approcher de ce sombre entonnoir ; |
12 |
10 |
Et, quoique mainte épine offensât ses mains blanches, |
12 |
|
Nous tâchâmes, penchés et nous tenant aux branches, |
12 |
|
D'en voir le fond lugubre et noir. |
8 |
|
|
En ce même moment, un titan centenaire, |
12 |
|
Qui venait d'y rouler sous vingt coups de tonnerre, |
12 |
15 |
Se tordait dans ce gouffre où le jour n'ose entrer ; |
12 |
|
Et d'horribles vautours au bec impitoyable, |
12 |
|
Attirés par le bruit de sa chute effroyable, |
12 |
|
Commençaient à le dévorer. |
8 |
|
|
Alors, elle me dit : « J'ai peur qu'on ne nous voie ! |
12 |
20 |
« Cherchons un autre afin d'y cacher notre joie ! |
12 |
|
« Vois ce pauvre géant ! nous aurions notre tour ! |
12 |
|
« Car les dieux envieux qui l'ont fait disparaître, |
12 |
|
« Et qui furent jaloux de sa grandeur, peut-être |
12 |
|
« Seraient jaloux de notre amour ! » |
8 |
|
Septembre 18..
|