Métrique en Ligne
HRV_1/HRV22
Henriette HERVÉ
DILECTION
1925
SUIVANT L'HUMEUR DES JOURS
APRÈS UNE LECTURE DÉCEVANTE
Poète ce n'est pas ainsi 8
Qu'il faut parler ! Je souffre !… As-tu de frais dictames 12
Pour des brûlures sans merci ? 8
As-tu de généreuses flammes 8
5 Qui pourraient attiser un bûcher sans éclat 12
Où fument les lambeaux d'un cœur ardent mais las ? 12
Choisis ! Je veux que tu ' me berces, 8
Comme un enfant, à des chants sans réalité, 12
Ou bien, qu'ivre par toi, je sache m'exalter 12
10 Du mal même qui me transperce ! 8
Puisque tu n'avais que des mots 8
Pour calmer mes douleurs et pour panser mes plaies, 12
Il fallait choisir les plus beaux ! 8
Peu m'importe qu'elle soit vraie 8
15 La chanson dont le rythme enchantera mon cœur, 12
Et dont je redirai l'émouvante langueur 12
En assonances délicates ! 8
Ses stances couvriront de leurs accords parfaits 12
Les discordances de la vie… Un cri se tait 12
20 Quand l'écho de la rime éclate ! 8
Pour mieux étouffer mes regrets 8
Je voudrais un récit de courts bonheurs sans causes, 12
Poète ! où tu rappellerais 8
Tout simplement de simples choses 8
25 Une aubépine en fleur sous un soleil d'avril, 12
L'horizon limité par le souple profil 12
De ces collines ondulées, 8
Un orgue dans la rue, un jour à son déclin, 12
Une fumée en l'air, et d'un balcon voisin 12
30 L'odeur d'un pot de giroflées… 8
Puis tu mènerais mon chagrin, 8
Aux heures où la terre et le ciel s'incendient, 12
Dans l'ombre et la paix d'un jardin 8
Où chanterait la mélodie 8
35 De la colombe gémissante et du jet d'eau ; 12
Tu dirais un mur blanc, deux cyprès en fuseaux… 12
…Je vois un portique céleste… 8
Et ton verbe, embaumé par des fleurs d'oranger, 12
Décrivant les arceaux d'un kiosque léger, 12
40 Prendrait la grâce de leur geste ! 8
Tu pourrais ainsi dérouler 8
Du jour et de la nuit la tranquille épopée. 12
Mais si, parmi les champs de blé, 8
Tu fais danser quelques Napées, 8
45 Ah ! ne vois que l'harmonieuse volupté 12
Des beaux corps ondoyants sous le soleil d'été ! 12
Je ne voudrais t'entendre dire 8
Ni le charme que jette un regard d'abandon, 12
Ni l'attrait d'une voix, ni, sous des cheveux blonds, 12
50 L'énigme d'un tendre sourire… 8
Et si tu veux parler enfin 8
De l'amour où les cœurs se révèlent eux-mêmes, 12
Du grand amour que nul n'atteint, 8
Puisque dans cet effort suprême 8
55 Et pour toucher le but, ne fût-ce qu'un instant, 12
Il faut unir deux pas dans un unique élan, 12
Deux gestes dans une riposte, 8
Et que de satisfaire à son propre désir 12
C'est le sacrifier et c'est l'anéantir 12
60 Dans un mutuel holocauste 8
Alors, poète ! par pitié, 8
Peins-le tel qu'il n'est pas, mais bien tel qu'on le rêve ! 12
Donne à des mots extasiés 8
La réponse qui les achève ! 8
65 Parlant d'Erôs, omets les silences cruels 12
Qui suivent de si près le chant de son appel ! 12
Farde son front de couleurs fraîches, 8
Pose un bandeau d'azur sur ses deux yeux crevés ! 12
Fais-moi croire au mensonge et fais-moi retrouver 12
70 Les rémiges d'or de ses flèches ! 8
Mais j'aimerais encore mieux 8
Ne plus me souvenir et m'enfuir dans un rêve 12
Où naîtrait. l'espoir merveilleux 8
Débordant de nouvelles sèves ! 8
75 Fais-moi voir, dans le frais silence du matin, 12
Quand vient jouer le vent des espaces sans fin 12
Parmi les fleurs et l'herbe verte, 8
L'envol d'une chimère !… Emporte-nous au jeu 12
De ses replis tout ocellés d'ambre et de feu 12
80 Et sur ses ailes large ouvertes ! 8
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