| I |
| LA VIE EXTÉRIEURE |
| LES LOIS — LES CULTES — LES FORMES |
| LES CULTES |
| LA TÊTE DU PAGE |
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À MADEMOISELLE ALICE HARAUCOURT
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— « Ô mon brave écuyer, c’est-il loin de Paris ? |
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— Las, Madame, bien loin : n’y verrons pas l’aurore. » |
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Et les chevaux suaient d’ahan dans le froid gris. |
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— « Ô mon brave écuyer, c’est-il bien loin encore ? » |
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Les bons chevaux s’allaient mourant à tous relais. |
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— « Loin, dis-nous ? — N’y viendrons pour voir le jour éclore… |
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— Ah ! malheur sur le Roi, son duc et ses varlets |
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Qui mènent à trépas les pages de grand race, |
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Les beaux fils qui la veille atornaient leur palais ! » |
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Un mont passa. Le temps fuyait. — « Si n’ai sa grâce, |
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Mon frère sera mort avant qu’il soit demain, |
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Mort, mon doux petit frère avant que je l’embrasse…» |
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Le col du destrier se tendait sous sa main, |
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Blanc d’efforts. L’air sifflait. — « Est-ce loin que nous sommes ? » |
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Et les sabots de fer claquaient sur le chemin. |
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— « As-tu pris mes joyaux, de l’or en larges sommes ?» |
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Un lac passa. — « Maudits les rois, les rois maudits, |
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Et que Dieu juge un jour ceux qui jugent les hommes ! » |
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Hop ! Hop ! L’aube teinta le bord des cieux blondis… |
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— « Des murs, là-bas, vois-tu ? — Non, c’est un bois qui houle… |
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— À qui le sauvera je rends mon paradis ! » |
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Le jour montait. — « J’entends les clameurs de la foule, |
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Des voix, des pas, le son des cloches au lointain ! |
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— Madame, c’est le bruit d’un grand fleuve qui coule. » |
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Ils vont, l’aurore, ouvrant ses tentes de satin, |
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Pose à leurs cheveux froids des baisers de rosée, |
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Et la ville apparaît dans l’air flou du matin. |
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Ils ont passé sous la voûte fleurdelisée. |
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— « La prison ? Le palais ? » Une vieille, à mi-voix, |
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Dit : « Pauvre enfant, sa tête était toute frisée… » |
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— « Que font ces gens autour de ces piliers de bois ?… |
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Mon frère ! » L’homme rouge a retroussé ses manches, |
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— « Grâce ! Arrêtez ! » Le crâne a rebondi deux fois. |
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Déjà la dame était à genoux sur les planches : |
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Elle prit dans ses doigts le front pourpre et glissant ; |
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Blanche, elle mit sa lèvre aux lèvres déjà blanches, |
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Et la face sourit dans ses larmes de sang. |
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