| L'ORESTIE |
| TRAGÉDIE ANTIQUE |
| FRAGMENT |
| LYNCÉE (LE VEILLEUR), sur la tour. |
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Voici dix ans bientôt que du haut de ma tour |
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De la flotte des Grecs je guette le retour |
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Attendant, sans espoir, qu'à l'horizon flamboie |
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Le signal convenu pour la prise de Troie. |
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Hélas ! j'ai beau plonger mes regards dans l'azur, |
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Rien ne s'allume au fond de ce lointain obscur. |
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Nulle rougeur de feux, nulle blancheur de voiles ! |
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— C'est ainsi que je vis, seul avec les étoiles, |
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Veillant, quand le sommeil a fermé tous les yeux, |
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Excepté les yeux d'or qui s'éveillent aux cieux ! |
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Trempé par la rosée et sans toit qui l'abrite, |
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D'aucun songe mon lit ne reçoit la visite, |
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Et si parfois dans l'ombre, aux noirs échos des nuits, |
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Je jette une chanson pour charmer mes ennuis, |
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En pensant aux malheurs de la maison d'Atride |
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Je sens dans mon gosier mourir ma voix timide ! |
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De ce rude labeur délivrez-moi, grands Dieux, |
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Et laissez le sommeil s'abattre sur mes yeux ! |
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Ah ! quel rude métier ! Quelle pénible tâche ! |
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| CLYTEMNESTRE, au pied de la tour. |
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Qui parle donc là-haut ? — Pauvre chien à l'attache, |
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C'est toi ? — Tu peux quitter ton gîte aérien, |
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Descends. A l'horizon il ne paraîtra rien, |
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Car souillée au départ du sang d'Iphigénie, |
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La flotte par les dieux ne peut être bénie ; |
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Les Grecs sont morts, ou bien égarés sur les mers, |
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De leurs débris errants, ils sèment l'univers ! |
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| ÉLECTRE |
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Ah ! par pitié pour moi, ne descends pas, Lyncée ! |
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Le feu peut luire encor, l'heure n'est point passée ! |
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