Métrique en Ligne
GAU_1/GAU16
Théophile GAUTIER
ÉMAUX ET CAMÉES
1872
A UNE ROBE ROSE
Que tu me plais dans cette robe 8
Qui te déshabille si bien, 8
Faisant jaillir ta gorge en globe, 8
Montrant tout nu ton bras païen ! 8
5 Frêle comme une aile d'abeille, 8
Frais comme un cœur de rose-thé, 8
Son tissu, caresse vermeille, 8
Voltige autour de ta beauté. 8
De l'épiderme sur la soie 8
10 Glissent des frissons argentés, 8
Et l'étoffe à la chair renvoie 8
Ses éclairs roses reflétés. 8
D'où te vient cette robe étrange 8
Qui semble faite de ta chair, 8
15 Trame vivante qui mélange 8
Avec ta peau son rose clair ? 8
Est-ce à la rougeur de l'aurore, 8
A la coquille de Vénus, 8
Au bouton de sein près d'éclore, 8
20 Que sont pris ces tons inconnus ? 8
Ou bien l'étoffe est-elle teinte 8
Dans les roses de ta pudeur ? 8
Non ; vingt fois modelée et peinte, 8
Ta forme connaît sa splendeur. 8
25 Jetant le voile qui te pèse, 8
Réalité que l'art rêva, 8
Comme la princesse Borghèse 8
Tu poserais pour Canova. 8
Et ces plis roses sont les lèvres 8
30 De mes désirs inapaisés, 8
Mettant au corps dont tu les sèvres 8
Une tunique de baisers. 8
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