Métrique en Ligne
FRK_2/FRK10
corpus Pamela Puntel
Félix FRANK
CHANTS DE COLÈRE
1871
L’EMPIRE
LE SPECTRE DE BAUDIN
UN jour — comme le Peuple, effaré sous l’attaque 12
D’un lâche, s’enfuyait, ayant peur des tambours,— 12
A l’heure où sous le pied tout se dérobe et craque, 12
Toi, tu voulus murir devant les vieux faubourgs ! 12
5 Dix-huit ans de silence et d’oubli sur ta tombe, 12
Dix-huit ans ont passé, gros de fange et d’horreur, 12
O martyr dont le nom se dresse enfin… et tombe 12
Entre le Peuple esclave et Cartouche empereur : 12
— Arme sainte ! arme pure aux mains de la justice, 12
10 De l’honneur éternel et de la liberté, 12
Arme du vrai courage, oh ! descends dans la lice… 12
Sinon pour nous, combats pour la Postérité ! 12
Dis au monde servile et gorgé d’infamies 12
Que le Droit n’est point mort parce qu’on l’étrangla ! 12
15 Il pleure sous la terre, et quand des mains amies 12
Le délivrent, il crie aux tyrans : « Me voilà !» 12
Oui, l’herbe pousse en vain sur une fosse obscure ; 12
En vain la force est reine et le crime encensé : 12
Tout ce que la rapine ou le meurtre procure 12
20 S’enfonce au gouffre ouvert par le Droit offensé ! 12
C’est Lui qui sort du sol, et c’est le Mal qui sombre ! 12
La barricade est grande et le trône est petit : 12
On la voit resplendir au fond de la nuit sombre ; 12
Le trône dans un flot de mépris s’engloutit, 12
25 Et la Peine au bras lourd, dont César en goguette 12
Riait avec les siens, — repu, joyeux, — soudain 12
Écartant le suaire où dans l’ombre elle guette, 12
Succède, épouvantable, au Spectre de Baudin ! 12
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