Métrique en Ligne
FOU_1/FOU19
Georges FOUREST
LA NÉGRESSE BLONDE
1909
ÉPITRE FALOTE ET BALNÉAIRE
ÉPITRE
FALOTE ET BALNÉAIRE
À JOSEPH SAVARY
dilettante bourguignon.
Eau bienfaisante !
Puissant secours
Qui nous exempte
De maux si lourds.
A. POMMIER.
Savary, joyeux compagnon 8
Africain, Gascon, Bourguignon 8
Qui vis joyeux loin des Quarante 8
Au pays de ces nobles ducs 8
5 Qu’en ses bouquins un peu… caducs 8
Célébra Môssieur de Barante 8
Bourguignon mais fils de Paris 8
Prince du rire et des houris 8
Contemnant le singe et le pître 8
10 Mon bon vieux, il me plaît, ce soir, 8
De t’envoyer, sans plus surseoir, 8
Une ode habillée en épître !… 8
Donc, chaque jour plus avachi 8
Je me trimbale dans Vichy 8
15 Où des Messieurs jaunes d’ictère 8
Aux dames de même couleur 8
Exposent les phases de leur 8
Goutte (civile ou militaire !) 8
De Guérêt, de Poulocondor, 8
20 Du Brésil où vit le condor, 8
Ducs, fabricants de margarines, 8
Cabotins, bourgeois saugrenus, 8
Comme une trombe, ils sont venus 8
Faire analyser leur urines. 8
25 Il en vient de Costarica, 8
Des bords du lac Titicaca, 8
De Pontoise et de Pampelune 8
Et de Bucharest et de Brest 8
Et je veux n’être plus Fourest 8
30 S’il n’en tombe aussi de la Lune ! 8
Barons juifs entasseurs d’écus, 8
Épiciers chauves et cocus 8
Et généraux de Bolivie 8
Ostentent d’un air convaincu 8
35 Leur bedaine et leur trou du cul 8
Aux doucheurs dont l’âme est ravie. 8
Les uns, dolents du pancréas 8
Rimeraient à « Jean Moréas » 8
D’autres (Larbaud leur soit propice) ! 8
40 Ayant du sucre en leur pipi 8
Semblent moins des pommes d’api 8
Que des morceaux de pain d’épice. 8
Le soir, au casino, des tas 8
De Mercadets et de rastas 8
45 Ouvrent la banque ou l’on trébuche 8
Rubis aux doigts, gilet trop neuf, 8
Ils savent l’art d’abattre Neuf 8
En donnant au ponte une bûche ! 8
Cependant que des avocats 8
50 Croassant comme des choucas 8
Mènent au concert leurs femelles 8
Dont le… bas-fond saigne encor du 8
Terrible effort d’avoir pondu 8
Quinze mômes affreux comme elles ! 8
55 Or ce que peut œuvrer, parmi 8
Tous ces Pécuchets, ton ami 8
Dis-moi, vieux frangin, que t’en semble ? 8
Sinon rêver aux jours (lointains 8
Hélas !) où les doux Philistins 8
60 Dans Paris nous verront ensemble ? 8
Ah ! ces beaux jours quand luiront-ils 8
Où, tenant des propos subtils, 8
Aux bourgeois taillant des croupières, 8
Nous jetterons au nez d’Homais 8
65 Nos rimes d’or sans que jamais 8
S’appesantissent nos paupières ! 8
Car il sied ne parler qu’en vers : 8
Comme un digne bourgeois d’Anvers 8
Soigne une tulipe et l’arrose, 8
70 Nobles jardiniers, cultivons 8
La fleur mystique et réservons 8
Aux maraîchers la vile prose ? 8
Des vers ! des vers ! et c’est pourquoi 8
Si tu veux qu’on te laisse coi 8
75 Siroter près d’une crédence 8
Ton vieux Beaune sache qu’il faut, 8
Sans rémission ni défaut 8
Épistoler et d’abondance !… 8
Et puis, t’ayant serré la main, 8
80 Je vais ronfler jusqu’à demain : 8
Le ciel, en son omnipotence, 8
Nous inspirant maint beau sonnet 8
Toujours nous préserve d’Ohnet, 8
De la grippe et de la potence ! 8
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