Métrique en Ligne
DUC_3/DUC72
Alexandre DUCROS
Les Étrivières
1867-1885
PREMIÈRE PARTIE
(1867-1870)
La Nostalgie de Joko
Le Singe de l'Impératrice
J'étais le plus gai des Jokos, 8
Là-bas, vers nos riantes côtes, 8
On m'enlève aux bois de cocos, 8
Pour la grand'ville des cocotes ! 8
5 Malgré le pompeux appareil, 8
Dont m'entourent des mains illustres, 8
Je regrette mon beau soleil, 8
Que ne remplacent point les lustres ! 8
Et je rêve, et je pleure encor, 8
10 En songeant aux rives lointaines, 8
Car mes chaînes pour d'or, 6
Hélas ! n'en sont pas moins des chaînes ! 8
Oh ! le grand bois tout parfumé ! 8
Quand la guenon dans la nuit bleue, 8
15 Guette l'approche de l'aimé, 8
Pendue aux branches… par la queue ! 8
Si pour distraire mes ennuis, 8
Dans le palais, où je soupire, 8
Si pour oublier où je suis. 8
20 La nouveauté venait m'instruîre ? 8
Mais, non ! ici comme là-bas, 8
Vers les palmiers qui m'ont vu naître, 8
Ce sont des bonds et des ébats 8
De courtisans sous l'œil du maître ! 8
25 Comme ils sautent ! qu'ils sont adroits ! 8
Oh ! que ces hommes sont habiles ! 8
On ne saurait trouver, je crois, 8
Des plus souples, mains plus agiles ! 8
Je disais : — « Oublions nos maux, 8
30 En étudiant où nous sommes. » 8
Mais je trouve encor des Jokos, 8
Où je croyais trouver des hommes ! 8
Et tout honteux je me tiens coi, 8
Et je rougis et je sanglote, 8
35 Et pour avoir pitié de moi, 8
Je n'ai pas la moindre Jokote ! 8
Courtisans, sautez tour à tour. 8
Sous l'habit brodé, le beau linge, 8
Mais craignez, que le maître, un jour, 8
40 Ne vous paie en monnai(e) de singe ! 8
J'étais le plus gai des Jokos, 8
Là-bas, vers nos riantes côtes, 8
On m'enlève aux bois de cocos, 8
Pour la grand'ville des cocotes ! 8
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