Métrique en Ligne
DUC_1/DUC12
Alexandre DUCROS
Les Capricieuses
1854
LE RÊVE D'UN ANGE
A JEAN REBOUL.
Pauvre mère, ton fils est mort !
L'Ange et l'Enfant, J. REBOUL.
Oh ! ma mère ! pourquoi ces pleurs 8
Qu'en secret je te vois répandre ? 8
Tu me dis, hélas ! que je meurs !… 8
Non ; dans le ciel je vais me rendre. 8
5 Est-ce mourir d'aller à Dieu 8
Goûter un bonheur sans mélange ? 8
Que de fuir ce terrestre lieu 8
Pour aller vivre comme un ange ? 8
Lorsque auprès de moi tu veillais, 8
10 Que la nuit couvrait de son voile 8
Le monde, et que je sommeillais, 8
Sur mon front une blanche étoile 8
Est descendue, et puis, mes yeux 8
Ont vu de splendides phalanges. 8
15 Oui, ma mère, j'ai vu les cieux, 8
Les cieux remplis de petits anges… 8
j'ai vu, mère, j'ai vu Celui 8
Dont tu m'as appris la tendresse, 8
Que tu m'as dit être l'appui 8
20 Du faible que chacun délaisse ; 8
Dans des jardins toujours fleuris, 8
J'ai vu bien des choses étranges : 8
J'étais, je crois, au paradis 8
Et je jouais avec les anges. 8
25 Nous allions sur des buissons d'or 8
Cueillir des fleurs toujours nouvelles, 8
Que l'on jetait pour prendre encor 8
D'autres fleurs mille fois plus belles, 8
El nous les tressions en festons 8
30 Aux accords des saintes louanges ; 8
Au Dieu d'amour nous les offrions, 8
Et Dieu souriait à ses anges. 8
Devant ce Dieu tout de bonté 8
Je tremblais et n'osais paraître, 8
35 Quand sur ton fils il a jeté 8
Un doux regard, et ce bon maître 8
M'a dit : — Je l'ai bien entendu : 8
Veux-tu pour tes mortelles langes 8
Le nymbe d'or ? — J'ai répondu : 8
40 Je veux rester avec tes anges ! 8
Et quittant alors le bon Dieu, 8
Redescendant vers toi, ma mère, 8
Je suis venu te dire : adieu ! 8
Puis m'envoler loin de la terre. 8
45 Mon âme, pour le paradis, 8
Va fuir un corps pétri de fange. 8
Ici-bas si tu perds un fils, 8
Là-haut tu trouveras un ange. 8
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