Métrique en Ligne
DLR_9/DLR839
Lucie Delarue-Mardrus
LES SEPT DOULEURS D'OCTOBRE
1930
VI
SPECTRES
SÉPULTURES
Après mes jours, qui furent beaux 8
De tant de tourments et de troubles, 8
Il me faut, pour finir, trois ou quatre, tombeaux 12
Où se reposeront mes doubles. 8
5 Il est un petit coin caché 8
Que ne découvrirait personne, 8
Où ma grand'mère étrange a, pour jamais, couché 12
Son âme de vieille lionne. 8
Voici le haut tombeau puissant 8
10 Où ma mère dort en famille, 8
Dans ce Paris grouillant dont elle fut la fille, 12
Et qu'elle eut toujours dans le sang. 8
Je sais des sables en Égypte 8
Où je me reposerais bien. 8
15 Car l'un de mes esprits veut, pour n'être plus rien, 12
Le grand sarcophage et la crypte. 8
Je demande aussi mes tilleuls, 8
Leur ombre épaisse sur ma pierre. 8
Là, loin des humains morts, j'aurais pour cimetière 12
20 L'avenue où mes pas vont seuls. 8
Et puis voilà toutes mes âmes 8
Réclamant l'océan profond. 8
O mer ! Par une nuit, trois cents mètres de fond, 12
Mon cercueil coulant sous les lames ! 8
25 Qui me choisira mon repos ? 8
Qui prendra soin de ma dépouille ? 8
Mon corps et mes esprits, quelle future fouille 12
Les trouvera, sombres dépôts ! 8
Mais, avant cette pioche ultime, 8
30 Où que vous placiez mon sommeil, 8
J'en sortirai la nuit ou par le grand soleil, 12
Pour hanter l'univers sublime. 8
Qu'alors ma voix dise à jamais, 8
Grand souffle dans le vent qui passe : 8
35 «• Me voici maintenant dans la mort que j'aimais, 12
Je suis donc enfin à ma place ! » 8
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