Métrique en Ligne
DLR_9/DLR786
Lucie Delarue-Mardrus
LES SEPT DOULEURS D'OCTOBRE
1930
I
L'AUTOMNE
CONVERSATION
‒ Qu'est-ce que tu dis, belle automne 8
Toute dorée au fond du soir ? 8
‒ Je dis : « Que ton cœur ne s'étonne 8
De ces choses qu'il te faut voir. 8
5 « Chaque feuille morte fut verte. 8
De celles que je perds sans vent, 8
Mais tout ce qui court à sa perte 8
Refleurira comme devant. 8
« Il ne naîtra pas d'autres choses 8
10 Que celles qui vont au trépas. 8
Aux roses succèdent des roses, 8
Et l'énigme n'existe pas. 8
« L'univers, rythme monotone, 8
Devrait t'apprendre ton destin. 8
15 Le printemps guette sous l'automne, 8
La nuit prépare le matin. 8
Tout ce qui vit jette semence, 8
Le même engendre le pareil. 8
C'est l'éternité du soleil 8
20 La nature dit : « Recommence ! » 8
« Pourquoi les terrestres humains 8
Seraient-ils différents des feuilles ? 8
Augure de tes lendemains 8
Par l'automne où tu te recueilles. 8
25 « Depuis qu'existe l'univers, 8
Rien ne change et rien ne varie. 8
Morte saison, saison fleurie, 8
Arbres jaunes, puis arbres verts. 8
« L'eau qui sommeille dans mes flaques 8
30 S'évapore et redevient eau. 8
Pourquoi rêverais-tu de Pâques 8
Et d'âmes montant vers le haut ? » 8
‒ J'ai dit : « Automne solennelle, 8
J'accepte le rythme et la loi, 8
35 Mais la feuille individuelle, 8
Mais l'âme, aussi, qui disait : « Moi ». 8
Où donc va-t-elle ? Où donc va-t-elle ? » 8
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