Métrique en Ligne
DLR_7/DLR672
Lucie DELARUE-MARDRUS
A MAMAN
1920
II
DE PROFUNDIS
SAINT SYLVESTRE
Voici : Pour la première fois 8
Je ne t'ai pas dit : « Bonne Année ! » 8
Cette couronne lourde aux doigts, 8
Sans parler je te l'ai donnée 8
5 Seule et noire dans l'hiver blanc, 8
Sur ta tombe où l'arbre s'incline, 8
Je venais, pour le nouvel an, 8
Pleurer mes larmes d'orpheline 8
La mort habitait les tombeaux, 8
10 L'hiver mettait dessus sa neige. 8
Et moi, retenant mes sanglots, 8
« C'est le froid partout, me disais-je. » 8
Cet an qui meurt, c'était encor 8
Un morceau de ton existence. 8
15 C'était la date de ta mort… 8
Demain, demain, quelle distance ! 8
Demain commence l'an nouveau. 8
Pour lequel tu n'es qu'une morte. 8
Vœux ? Souhaits ?… Plus rien-ne t'importe 8
20 Quêta place dans ton caveau 8
Comme tout mon être se cabre ! 8
Là, sous cette pierre, maman, 8
En somme peu profondément, 8
Tu n'es plus qu'un objet macabre 8
25 Tu ne me verras jamais.plus. 8
Pour toi ma vie est terminée. 8
Tant de jours, ce soir révolus, 8
C'est, pour toi, ma dernière année 8
L'an neuf qui te reste étranger 8
30 Sera donc le début d'une ère. 8
Je vivrai maintenant sans mère, 8
Tu ne me verras plus changer 8
Adieu, maman ! Sans nulle envie 8
Je vais vers la maturité. 8
35 Ce soir, la moitié de ma vie 8
S'engouffre dans l'éternité 8
Adieu maman, tombe carrée ! 8
Hélas ! Quand minuit sonnera, 8
Froide, noire, commencera 8
40 Ta première année enterrée… 8
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