Métrique en Ligne
DLR_6/DLR629
Lucie DELARUE-MARDRUS
SOUFFLES DE TEMPÊTE
1918
VII
LA GUERRE
A HONFLEUR
Honfleur, vieille ville ardoisée 8
Sur l'estuaire aux cent couleurs, 8
Tu portes sue chaque croisée 8
De beaux géraniums en fleurs. 8
5 Honfleur, les barques accourues 8
Du fond des hasards de la mer, 8
Toutes voiles dehors, ont l'air 8
De se promener dans les rues. 8
Honfleur, le poisson, le goudron 8
10 Sentent fort dans les trous saumâtres ; 8
Mais tu berces dans ton giron 8
L'âme des horizons bleuâtres. 8
Or voici : petite cité 8
Humble et perdue au bout du monde, 8
15 Maintenant que la guerre gronde, 8
Nous aurons connu ta bonté. 8
Au jour que sont venus du large 8
Ces bateaux rouges de soldats, 8
Honfleur, comme tu les aidas 8
20 A porter leur pesante charge ! 8
Tu n'avais pas assez de mains 8
Pour tendre tes présents, ô ville ! 8
U fus généreuse et civile, 8
Tu connus de grands jours humains. 8
25 Quand vinrent des blessés de guerre, 8
Tu renouvelas ton effort. 8
Tous, jusqu'à ta moindre commère, 8
Voulaient donner, donner encor. 8
Aujourd'hui, la noble Belgique 8
30 Déverse sur toi ses enfants, 8
Tant de vaincus qu'un sort tragique 8
Fait tout de même triomphants, 8
Et toi, douce et pleine de grâce, 8
Pour les accueillir, tu souris. 8
35 Tu veux, puisqu'on leur a tout pris, 8
Qu'ils aient à ton foyer leur place. 8
Tu veux qu'ils puissent, orphelins, 8
Dire à la destinée amère : 8
« Voici qu'une seconde mère 8
40 Nous a tendu des bras câlins. » 8
‒ Salut ma ville ! Tu fus grande, 8
O pauvre petit coin normand ! 8
Nous ignorions ce cœur aimant 8
Qui donne sans qu'on lui demande. 8
45 Nous sommes fiers, tous ceux d'ici, 8
D'un tel charme joint à tes charmes. 8
C'est pourquoi nous viennent ces larmes 8
Lorsque nous te disons : « Merci ! » 8
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