Métrique en Ligne
DLR_6/DLR567
Lucie DELARUE-MARDRUS
SOUFFLES DE TEMPÊTE
1918
II
ADMIRATIONS
PARIS
Que de gens t'ont chanté, Paris, 8
Gens de misère et de liesse ! 8
Mais de toi l'on est tant épris 8
Qu'on croit inventer sa tendresse. 8
5 Qu'es-tu cependant, après tout, 8
Et quelle est cette âme qui hante 8
Maisons et monuments debout 8
Autour de ta Seine rampante ? 8
Paris, fer et pierre, parfum 8
10 De roses, de sang et d'ordure, 8
Toi qu'on aime comme quelqu'un 8
Et d'un amour qui toujours dure… 8
Souvent tu nous as fait du mal, 8
Même à nous, riches et prospères. 8
15 Que de fois notre pas loyal 8
Marcha sur ton nid de vipères ! 8
Mais on ne peut pas tout vouloir, 8
Trop égoïstement l'on t'aime : 8
Dans la joie ou le désespoir 8
20 En toi chacun s'aime soi-même, 8
S'aime soi-même et voire autrui, 8
Car c'est autrui qui fait la ville… 8
De quelle nature subtile 8
Le grand cœur qui bat dans ton bruit ? 8
25 Savons-nous si tu nous fascines 8
Par tant de grands rêves rêvés 8
Ou si c'est qu'entre tes pavés 8
Croissent nos mauvaises racines ? 8
Le grandiose et le petit, 8
30 Pensée, art, plaisir, crime, histoire, 8
Oui, quel que soit notre appétit, 8
Tu nous sers à manger et boire. 8
Ta Notre-Dame où chaque tour 8
Unit la chimère avec l'ange 8
35 Nous dit ton étrange mélange 8
D'esprit, de chair, d'horreur, d'amour. 8
Ah ! Que par toi la terre crie ! 8
Tu règnes partout de moitié, 8
Paris, cerveau de ma patrie, 8
40 Paris, cerveau du monde entier ! 8
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