Métrique en Ligne
DLR_5/DLR504
Lucie Delarue-Mardrus
PAR VENTS ET MARÉES
1910
LA ROUTE
AUX DERVICHES MEWLEWI
Je garde ce bonheur entre tous les bonheurs 12
D'avoir connu la descendance 8
Platonique, la seule, en ces divins tourneurs 12
Pâlis de musique et de danse. 8
5 Une flûte blessée à voix de rossignol 12
Accompagne des tambours frêles ; 8
Et, pour que vingt soufis prennent soudain leur vol, 12
Les bras s'ouvrent comme des ailes. 8
Ils tournent ! Je te vois, cercle passionné, 12
10 Et je te sens, spasme de l'âme ! 8
Au grand rythme muet de ces jupes de femme, 12
Tout mon être aussi veut tourner. 8
Chœur d'esprits qui glissez comme jadis les anges 12
Sur un signe de Gabriel, 8
15 Chacun de vous, blanc papillon surnaturel, 12
Se multiplie en pas étranges. 8
C'est la ronde de rêve et de réflexion. 12
Une main jette, et l'autre accepte. 8
Votre hypostase danse et redit le précepte 12
20 D'éternelle giration. 8
Le tournoiement sans bruit de vos candides voiles 12
Évente le mystique lieu, 8
Et vous perpétuez, ô frères des étoiles, 12
Le mouvement qui plaît à Dieu. 8
25 Soufis ! Le beau-désir de voler vous emporte ! 12
Dans un geste crucifié, 8
Vous tournez, les bras étendus, la face morte 12
Et le souffle raréfié. 8
Vous tournez, vous tournez, enivrés'de vertige, 12
30 Heureux jusques à la douleur, 8
Et votre robe semble, arrachée à sa tige, 12
Une immense et démente fleur. 8
Le vol silencieux ! La fraîcheur d'ailes blanches ! 12
Ah ! que chaque pas, chaque tour, 8
35 Bue chaque glissement des pieds nus sur les planches 12
Répète : Amour ! Amour ! Amour !… 8
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