Métrique en Ligne
DLR_4/DLR468
Lucie DELARUE-MARDRUS
LA FIGURE DE PROUE
1908
AU PORT
LE POÈME DU LAIT NORMAND
Intarissable lait de velours blanc qui sors 12
Des vaches de chez nous aux mamelles gonflées, 12
Lait issu de nos ciels mouillés, de nos vallées. 12
De nos herbages verts et de nos pommiers tors. 12
5 Je pense en te buvant à ces bonnes nourrices, 12
Trésor très précieux entre les bestiaux. 12
Je revois les beaux yeux tranquilles des génisses. 12
Les taches de rousseur sur le blanc de leur dos. 12
Je crois connaître en toi le goût des paysages 12
10 Traversés de soleils couchants et de matins, 12
Si bleus sous le duvet de prune des lointains 12
Et parfumés de fleurs, de fruits et de fourrages. 12
Louange à toi, beau lait généreux qui Jaillis ! 12
En vérité je bois avec toi mon royaume 12
15 Riche en clochers à jour et riche en toits de chaume, 12
Louange ! car je bois avec toi mon pays, 12
Mon cher pays, le seul où mon cœur se retrouve 12
Chez lui, sans plus songera revendiquer rien, 12
Mon cher pays, le seul où je me sente bien 12
20 Comme un petit contre sa mère qui le couve. 12
Louange à toi, beau lait, ô mon lait maternel ! 12
Donne-moi la vigueur qui menait mes aînées. 12
Puisses-tu me nourrir encor bien des années 12
Avant l’ennui profond du repos éternel. 12
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